Hiro’a n°179 – Dossier
Dossier
Maison de la Culture (TFTN) – Te Fare Tauhiti Nui
Rencontre avec Jean-Christophe Shigetomi, chargé de mission pour la Maison de la culture et commissaire de l’exposition Muriāvai ou 37 années d’arts ; Gotz et TVaite, artistes peintres ; Teva Vi ctor, s cul pteur ; Ben Thouard, photo g raphe ; Tatia na Botty, cheffe de l a cellule culturelle Te Fare Tauhiti Nui . texte : L ucie Rabréaud – Photos : Lucie Rabréaud / TFTN / D.R
La salle Muriavai : 37 années de création artistique
La Maison de la culture va présenter une quarantaine de pièces issues de son fonds d’œuvres constitué grâce aux expositions organisées salle Muriāvai. Trente-sept années de peinture, de sculpture, de travail d’une multitude d’artistes, qui tous ont exposé dans cette salle : un tremplin pour les uns, une continuité pour les autres, et toujours un moment particulier.
Le tableau rouge d’Henri Crocq, appelé Arearea, sera le premier à intégrer le fonds d’œuvres de la Maison de la culture, qui compte désormais deux cents pièces. Nous étions en 1985 et TFTN commençait à accueillir des œuvres, des dons d’artistes, comme Bobby ou André Marere. Quelques années plus tard, en 1998, la salle Muriāvai, plus ou moins laissée à l’abandon après avoir été au cœur du renouveau culturel, connaissait une deuxième vie. Jean-Marc Pambrun, à l’époque directeur de la Mai – son de la culture, a l’idée d’en faire une salle d’exposition. Beaucoup d’artistes sont en train d’émerger, c’est le moment de leur proposer un lieu où ils peuvent présenter leurs œuvres. En échange de l’utilisation de la salle et de ses installations, d’un coup de pouce de l’équipe de la Maison de la culture pour la communication, les artistes laissent une œuvre à l’établissement. « C’est Francis Stein qui est l’instigateur de cette formule qui va permettre de constituer un fonds d’œuvres », raconte Jean-Christophe Shigetomi, chargé de mission pour la Maison de la culture et commissaire de l’exposition Muriāvai ou 37 années d’art. L’artiste Tehina sera le premier à exposer avec le concept qu’on connait aujourd’hui.
Non seulement ce fonds d’œuvres compte de nombreuses toiles et peintures mais également des bijoux (avec notamment Hiro Ou Wen, fidèle de la salle Muriāvai) et des sculptures. « L’idée est venue de faire une exposition car en fin d’année, nous sommes censés nous en dessaisir. C’est une façon de marquer la fin d’une période de TFTN », précise Jean-Christophe Shigetomi. En effet, ce fonds d’œuvres va quitter la Mai – son de la culture pour rejoindre les collections du Musée de Tahiti et des îles où les conditions de conservation seront plus appropriées. Mais les expositions, avec une œuvre déposée par artiste, continueront. Impossible de tout exposer, il fallait donc préciser des thèmes, des idées conductrices pour guider les choix. « Évidemment nous ne pouvions pas passer à côté des œuvres de renom comme celles de Bobby Holcomb dont nous possédons cinq tableaux ou encore celles de Ravello dont le tableau conservé à la Maison de la culture a servi à faire l’affiche du Heiva i Tahiti 1995. » En bref, des œuvres d’une valeur artistique indéniable, celles qui s’attachent à représenter la culture polynésienne à travers les légendes, le tatouage, l’histoire, le Heiva, la nature, les vagues…
Le travail pour les équipes a d’abord été d’inventorier tout le stock, de prendre en photo chaque œuvre et de préparer leur transfert vers le musée. Le choix a été « difficile », reconnait Jean-Christophe Shigetomi qui souhaitait une certaine homogénéité pour l’exposition. Ce sera pour le public l’occasion d’admirer des œuvres rarement présentées mais égale – ment d’y constater une évolution avec les dernières pièces, plus contemporaines. « C’est un panel de trente-sept années de visions artistiques. » Accompagnant chaque pièce, trente toiles et six sculptures, un panneau donnera des explications sur l’artiste, sa biographie, son travail, ses intentions. Un QR code sera également disposé pour accéder à des vidéos sur les artistes dans leurs ateliers avec des témoignages et des commentaires liés à leur art. Le tout est disponible en ligne sur le site de la Mai – son de la culture.
P R ATIQUE
Maison de la culture
- Du mercredi 28 septembre au samedi 8 octobre 2022, salle Muriāvai, à la Maison de la culture
- Entrée gratuite
- https://www.maisondelaculture.pf/
- Facebook : Maison de la culture de Tahiti
Teva Victor
« J’ai pu aménager l’espace à ma manière »
« La salle Muriāvai, c’est mon début dans le domaine professionnel artistique. Je sculpte depuis longtemps, d’abord le bois et puis la pierre, mais l’année où j’ai décidé de me confronter au public, je l’ai fait en réservant un an à l’avance la salle Muriāvai. C’est un lieu où beaucoup d’artistes passent, s’y essayent. Une galerie d’art prend un pourcentage qui est conséquent donc quand on démarre, on se cherche, c’est bien d’avoir un lieu comme la salle Muriāvai.
Ma première exposition s’est déroulée en 2012. J’ai pu aménager l’espace à ma manière, notamment en amenant un petit établi, mes gants usés, quelques outils, des éclats de pierres, je voulais montrer le travail qu’il y a derrière et que le public appréhende mieux toute la démarche et le processus. J’ai aussi amené une pierre en cours pour mieux comprendre l’évolution. Quand on voit une œuvre finie, on trouve ça superbe mais on peut s’imaginer des choses : c’est un moulage, c’est peint, c’est en plastique… J’ai pu amener un contexte avec de la matière brute et cassée.
C’était un rendez-vous que j’essayais de tenir toujours à la même date : en décembre de chaque année. Dès la première exposition et toutes celles après, ça a très bien marché, c’était le contrat que j’avais avec moi-même : si ça marche, je continue.
Aujourd’hui, j’évolue vers autre chose : des œuvres monumentales qui sont plutôt destinées à l’extérieur. Elles sont souvent rapidement vendues et partent un peu partout : en Angleterre, en Israël, en Amérique, en France, à Nukutepipi, à Bora Bora. On est tellement pompeux de notre évolution scientifique, technologique, intellectuelle… La pierre immense, immuable dans le temps, nous redonne de l’humilité. Je garde une affection particulière pour la salle Muriāvai, qui m’a permis de réellement me confronter au public dans mon démarrage qui était incertain, qui n’était pas prédestiné, et qui m’a aidé à asseoir une notoriété qui, petit à petit, est sortie de nos frontières. »
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Gotz
« On touche un public différent »
« Ma troisième exposition a eu lieu salle Muriāvai, à la Maison de culture. J’y ai exposé au moins cinq fois individuellement et j’ai participé à des événements collectifs. Je suis très attaché à la Maison de la culture et à la salle Muriāvai : ce sont des lieux de passage pour moi. Quand je suis dans le coin ou que je vais à la bibliothèque, je passe voir l’exposition du moment à Muriāvai. C’est un endroit où j’ai partagé beaucoup de choses, que ce soit avec les artistes mais aussi avec le public car on doit assurer des permanences quand on expose. C’est chargé de souvenirs ! C’est un endroit extrêmement pratique : il y a un grand parking, la salle est ronde, on peut donc avoir un visuel complet de l’exposition et une scénographie intéressante, c’est convenablement éclairé, et une partie des frais de l’exposition est supportée par la Maison de la culture. Le seul point noir est la durée des expositions : cinq jours, c’est trop court ! À chaque événement, l’artiste laisse une œuvre et je trouve que c’est un bon deal. Une exposition coute chère et c’est un pari sur des ventes que l’on ne va peut-être pas réaliser, être libéré financièrement du cout de la salle et de la communication est une bonne chose. Ça m’a toujours fait plaisir de laisser une œuvre, c’est important d’être dans le fonds d’œuvres de la Maison de la culture. Je suis honoré d’y être.
Je prépare une nouvelle exposition pour la salle Muriāvai à la fin de cette année qui regroupera deux années de travail avec des œuvres abstraites sur grandes toiles et des œuvres figuratives avec des modèles. La salle permet d’installer de grandes pièces et d’avoir suffisamment de recul, ce qui est rare dans les galeries. Et puis, on touche un public différent, certains appréhendent d’entrer dans les galeries, c’est plus facile pour eux de venir à Muriāvai, beaucoup de gens viennent par hasard, c’est un public éclectique. »
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Ben Thouard
« J’ai signé des livres toute la soirée, un carton ! »
« En 2018, j’ai sorti mon premier livre, Surface. Nous avons organisé le lancement du livre à Paris, avec une galerie avec laquelle je travaillais et je souhaitais faire la même chose à Tahiti. Je n’avais pas une grande attention à l’époque de la part des galeries qui se concentraient plus sur la peinture ou la sculpture. Quand j’ai proposé mon travail à la Maison de la culture, il a d’abord été refusé car tous les créneaux étaient pris. Et puis, j’ai eu de la chance : une personne s’est désistée et j’ai pu y organiser le lancement de mon livre. J’ai réussi à convaincre des sponsors et des gens de m’aider financièrement pour les tirages car ça coute très cher. Une exposition est toujours un investissement. La configuration de la salle est intéressante : j’avais disposé des formats différents avec des présentations différentes sur chaque mur et l’exposition entière est visible où que tu sois dans la pièce. C’était beau, c’était grand. J’ai pu diffuser une vidéo. J’étais vraiment content. Le premier soir, nous avons organisé un vernissage et Mylène m’avait dit qu’en moyenne on comptait une soixantaine de personnes mais ce soir-là, il y a eu trois cents personnes qui sont venues ! Mylène n’avait jamais vu ça. J’ai signé des livres toute la soirée, un carton et une super expérience ! Alors que c’était difficile de trouver un lieu, la salle Muriāvai permet aux artistes d’exposer, c’est vraiment super. La Maison de la culture a fait de la communication et je suis passé dans les médias, ça m’a permis d’aller à la rencontre du public, des fans et de ceux qui ne connaissaient pas mon travail et de gagner en réputation sur Tahiti. C’était l’occasion de présenter mon travail. J’ai sorti un deuxième livre : Turbulences en novembre 2021 mais je ne suis pas retourné à la salle Muriāvai. J’ai envie d’y refaire quelque chose mais il faudra que ce soit encore plus beau et plus grand que la première fois ! »
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Tvaite
« C’est grâce à la salle Muriāvai que j’existe »
« La salle Muriāvai, c’est mon tremplin, sans elle, il n’y aurait pas de Tvaite. Quand j’ai décidé de quitter l’enseignement, j’ai fait ma première exposition à Raiatea mais c’était familial, avec les copains et copines, il n’y avait pas stress. Ça m’a donné le courage de venir à la capitale. À l’époque, j’avais fait la tournée de toutes les galeries mais aucune ne m’a ouvert ses portes. Je me suis tournée vers la Maison de la culture qui a bien voulu m’accueillir et depuis sept années, j’y expose. La salle Muriāvai, c’est toute ma vie d’artiste, sans elle, je serais retournée à l’enseignement. Les expositions ont eu du succès, j’ai pu vendre des œuvres et vivre de mon art. Lors de la première exposition en 2017, j’ai présenté une quarantaine de toiles et il m’en restait cinq ou six qui n’ont pas été vendues. Ça a beaucoup plu. Et ces événements ont débouché sur plein de rencontres et d’opportunités. Ça a également été très formateur car la Maison de la culture nous met la salle à disposition, fait de la communication mais j’ai dû contribuer à tout ça en contactant les médias, en distribuant des cartons d’invitation, en créant un vernissage avec un cocktail. Je suis très reconnaissante envers la Maison de la culture qui offre la chance aux artistes de se lancer.
Je me souviens d’une exposition sur le thème de l’arc-en-ciel, j’avais utilisé la forme circulaire de la salle pour que le public traverse les couleurs de l’arc-en-ciel ! C’est un lieu très accessible pour tous, j’ai eu la visite des écoles, des prisonniers en réinsertion, des jeunes en difficulté, des touristes… C’est ce que j’aime : elle est ouverte à tous et les gens n’ont pas l’appréhension de la galerie, ce qui correspond bien à ma philosophie car pour moi, l’art, c’est pour tout le monde. Avec le parking, les gens peuvent venir facilement. Aujourd’hui, je ne vois plus l’intérêt d’aller en galeries. Exposer à la Maison de la culture permet peut-être aussi d’être plus abordable pour les clients qui souhaiteraient acheter des toiles car il n’y a pas la commission de la galerie.
C’est grâce à la salle Muriāvai que j’existe. Je vis aujourd’hui de mon art et je suis actuellement en résidence à la Cité internationale des arts de Paris. L’idée est d’approfondir la pratique, de rencontrer des artistes d’autres horizons, c’est très cosmopolite. »
Muriāvai : ancien département de recherche et de créations
La salle Muriāvai n’a pas toujours été la salle d’exposition que l’on connait aujourd’hui. Ses murs ont accueilli les bureaux et les ateliers du département de recherche et de créations créé en 1981 avec l’avènement de l’établissement public dénommé l’Office territorial d’actions culturelles (Otac).
De ces murs, vont émerger les principaux outils du renouveau artistique culturel portés par Henri Hiro, ses œuvres théâtrales puis celles de ses successeurs.
En 1978, la Maison de la culture de la Polynésie française se dote d’une unité cinématographique. Henri Hiro la baptise du nom de Matarau, ou regards multiples ou yeux divers et nombreux. Les ateliers de Matarau vont occuper l’espace de l’actuel Cyber.
Pour conduire son département de recherche et de créations, Henri Hiro est assisté de Coco Hotahota puis de John Mairai. Une première pièce de théâtre est montée, Punu, puis une deuxième, Poroi avec Coco Hotahota. En 1988, après le départ d’Henri Hiro, John Mairai prend la direction du département. En 1989, John Mairai traduit Macbeth de Shakespeare en tahitien sous le titre de Maro Putoto puis Le Bourgeois gentilhomme de Molière : Manu Tane. Lorsque le département de recherche et de créations délaisse ses ateliers et perd ses forces vives, ses locaux se transforment en magasins de stockage et en entrepôt. Sous l’impulsion de Jean-Marc Pambrun, de premiers réaménagements intérieurs de la salle Muriāvai vont permettre l’accueil d’expositions d’art.
(Extrait du panneau sur la salle Muriāvai pour les 50 ans de la Maison de la culture – Jean-Christophe Shigetomi)
Tatiana Botty, cheffe de projet culturel à Te Fare Tauhiti Nui
« Soutenir les primo-exposants »
Quel est l’avenir de la salle : va-t-elle continuer à accueillir des artistes comme elle le fait depuis trente-sept ans ?
Rendez-vous incontournables pour les artistes mais aussi pour le public, les expositions en salle Muriāvai vont naturellement se poursuivre en 2023 et des créneaux ont d’ailleurs déjà été réservés par des artistes. Nous avons des artistes réguliers qui ex – posent chaque année, ceux qui exposent pour la première fois et ceux qui sont de passage en Polynésie française. Cette année, nous avons eu la joie d’accueillir un étudiant polynésien qui a exposé ses œuvres afin de pouvoir financer une partie de ses études.
Avez-vous envie de privilégier certains artistes ?
L’objectif fixé pour 2023 est de soutenir spécifiquement les primo-exposants, ceux qui n’ont jamais exposé en salle Muriāvai, qui ne sont pas encore connus ou qui souhaitent se lancer. Dans cette optique, nous allons dans un premier temps prendre contact avec les artistes disposant d’une carte d’artiste délivrée par la Direction de la culture et du patrimoine que l’on retrouve sur le site internet qui leur est dédié www.artistes.pf. Toutefois, l’établissement reste ouvert aux propositions des artistes plus connus ou qui ont déjà exposé en salle Muriāvai car il s’agit avant tout de démocratiser l’accès à la culture. Les créneaux seront partagés entre les primo-exposants et les exposants réguliers.
Avez-vous d’autres projets pour cette salle ?
Une réflexion a été initiée afin de diversifier l’utilisation de la salle Muriāvai en conservant une offre en expositions mais aussi en nous ouvrant à des manifestations ou des expositions d’initiative de TFTN. Ces dernières auraient un objectif éducatif à destination de tous publics. Ainsi, deux créneaux de trois semaines ont été réservées pour asseoir leur organisation. Des thématiques sont en cours d’étude et de construction et feront l’objet d’une communication et d’une promotion correspondante une fois consolidées.
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Mylène Raveino, responsable des activités permanentes dont les expositions de la salle Muriāvai « Surprendre le public ! »
« Au tout début, ce n’était pas la salle Muriāvai telle qu’on la connait aujourd’hui, c’était un entrepôt pour du matériel. Il a fallu tout déménager, on a mis des contreplaqués sur les surfaces vitrées, pour faire des surfaces où accrocher les tableaux, on a tout peint en blanc, on a peint le ciment au sol… On a fonctionné comme ça un moment puis on a fini par carreler le sol. Je me souviens qu’on a fait ces travaux durant un week-end ! On s’y est tous mis, dont Heremoana (Maamaatuaiahutapu, le ministre de la Culture et de l’Environnement et ancien directeur de la Maison de la culture, ndlr). La première exposition, c’était Tehina. Il avait déjà exposé en France car il y a fait ses études d’art plastique mais c’était la première à Tahiti. Je me souviens d’une longue discussion dans l’actuelle salle de projection, j’adore sa peinture et je voulais absolument l’exposer. Après, il y a eu Linh Cao, qui avait à peine vingt ans. Jean-Marc Pambrun, lorsqu’il dirigeait la Maison de la culture, a lui-même exposé. C’est parti comme ça et ça ne s’est jamais arrêté !
Je me souviens des vernissages de Raymond Vigor. C’est un artiste fantasque et à chaque exposition, il y a un happening, et il faut s’attendre à tout. Je me souviens aussi d’une déception énorme avec une artiste dont je n’avais vu les tableaux que sur photos mais le résultat en vrai était décevant ! Ça a été très difficile. Il y a les expositions de Teva Victor lorsque les camions de la Satnui arrivent pour descendre ses sculptures qui pèsent des tonnes. C’est tout une organisation. Il y a mon coup de cœur pour Teora qui n’avait que onze ans quand il a exposé. Il y a eu aussi des expositions osées comme l’expo X de Gaya. Que de réactions ! L’entrée était interdite aux enfants. J’aimais beaucoup recevoir également Mélanie Dupre qui vit à Huahine et fait de la peinture à l’huile ou Raymond Vigor qui voyage beaucoup dans les îles. Ces artistes amènent la fraicheur des îles. Je me suis aussi attachée à proposer des choses pour surprendre le public comme l’art abstrait. »