Hiro’a n°170 – L’oeuvre du mois

L’œuvre du mois

Rencontre avec Titouan Lamazou, artiste navigateur. Texte et photos : Delphine Barrais

Escales en PF expo Titouan

Plus de deux cents œuvres de Titouan Lamazou sont exposées au Musée de Tahiti et des îles. Elles sont le prolongement d’un premier événement organisé au Quai Branly il y a trois ans. Il s’agissait d’une balade du bateau-atelier de l’artiste aux Marquises. Depuis, son embarcation est allée dans les quatre autres archipels polynésiens. Et c’est ainsi que le projet Escales en Polynésie est né.

Tandis qu’il effectue des tests d’écriture crayon sur les murs de la salle d’exposition temporaire du Musée de Tahiti et des îles, Titouan Lamazou raconte. Il revient sur les dernières années de sa vie qui l’ont mené au projet Escales en Polynésie. «En 2016, le musée du Quai Branly m’a donné carte blanche, j’ai proposé un voyage à bord de mon bateau-atelier  aux caraïbes et aux îles Marquises. » Fin 2018, début 2019, l’exposition a eu lieu dans l’Atelier Martine Aublet du musée parisien. Miriama Bono, directrice du Musée de Tahiti et des îles l’a visitée. « Elle m’a dit : tu sais, il n’y a pas que les Marquises en Polynésie  !  » Après les Marquises, le bateau-atelier a donc sillonné les autres archipels, il a navigué dans « cette galaxie essaimée où chaque île est une planète, à nulle autre pareille ».

Le bateau-atelier de Titouan Lamazou est un rêve lointain sur le point de se concrétiser. Ce sera une pirogue double de 30 mètres, habitable, autonome et moderne, un atelier comme un poste d’observation. Construite dans un chantier naval de la Rochelle, elle sera basée en Polynésie et pourrait arriver d’ici deux ans. Elle accueillera à son bord des artistes et des chercheurs suivant la logique de son concepteur. En effet, il travaille en permanence avec des scientifiques. Par exemple, pour la partie botanique, il a fait confiance à Jean-François Butaud, pour l’histoire, l’archéologie à Marie-Noëlle Ottino et Pierre Ottino-Garanger, pour l’anthropologie à Frédéric Torrente. «  ils répondent à ma curiosité et surtout m’évitent de véhiculer des poncifs. »

Plus de deux cents œuvres

Titouan Lamazou change de crayon, il tente un début de phrase avec une mine grasse, puis opte pour une mine moyenne, essaie une plus fine. Les tableaux, ils sont plus de deux cents, sont assortis d’une légende manuscrite. Ce sont de courtes phrases qui situent souvent le paysage admiré dans le temps et dans l’espace ou nomment les femmes et les hommes dont l’artiste a immortalisé les traits.

Titouan Lamazou a une anecdote pour chacune et chacun, un argument pour justifier la part grandissante laissée à la nature. Chaque arbre, chaque fleur, mais aussi chaque pierre ou chaque poisson peint sous l’eau – Titouan Lamazou travaille sur le motif, à l’air libre sur la terre, ou bien immergé sous les flots – a « comme une personnalité  ». Il donne du temps au temps, se laisse imprégner par «  ce que les occidentaux ont considéré comme seulement utile  à l’homme ». La Polynésie n’est pas faite d’espaces naturels, elle est la nature. « Monts et récifs, coraux et végétaux, habitants des lagons et des forêts racontent à leur manière les entrelacs merveilleux du pays-océan où je m’attarde aujourd’hui. »

Escales en Polynésie démarre aux Marquises, puis suit le trajet des tout premiers Polynésiens  : les Tuamotu, les Gambier, la Société, les Australes. Chaque archipel a sa carte dédiée, ses fleurs, ses personnages, ses lieux. Les cartes sont représentatives. Seule celle des Tuamotu pourrait éveiller un soupçon chez les plus attentifs car Titouan Lamazou, respectant une vieille tradition, y a glissé une île au nom de « la fiancée du cartographe ». Certaines scènes sont le fruit de l’imagination du peintre. «  Aux Marquises, j’ai pris plaisir à me figurer des rencontres entre stevenson, london, Gauguin et ségalen », illustre-t-il.

La scénographie de l’exposition est signée Titouan Lamazou. Il est accompagné dans cette tâche par «  un vieil ami  de plus de vingt ans », « un artiste », Vincent Beaurin. Rien n’est laissé au hasard. Le peintre est même venu avec ses pinceaux et ses couleurs pour faire des retouches sur certains diptyques afin d’obtenir une parfaite union. Le duo a démarré la mise en place en distanciel et s’est retrouvé sur place peu avant l’ouverture pour finaliser l’agencement des tableaux, des dessins et de certains objets comme la maquette du bateau-atelier ou une sculpture de Léon Lichtlé, ancien tāvana de Ua Huka.

En guise de catalogue, un beau livre édité par Au vent des îles. Tous les tableaux de l’événement du Musée de Tahiti et des îles y sont rassemblés. Il rapporte, en plus, les légendes de Titouan Lamazou et les textes de Zoé Lamazou qui a accompagné son père dans tous les archipels pour recueillir la parole des Polynésiens rencontrés. Des exemplaires du catalogue (disponible à la vente) seront mis à disposition des visiteurs qui voudront en savoir plus sur les femmes et les hommes exposés.

 

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Encadré

Dessine-moi un motu

Qu’ils habitent à Tahiti ou dans les îles les plus reculées, les élèves du cycle 3 ont la possibilité de participer à un concours de dessin. Celui-ci consiste à dessiner à la « manière de Titouan Lamazou » un motu.

Pour les visites des scolaires, veuillez réserver au préalable par mail via [email protected] ou par téléphone au 87 790 797

 

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Encadré

Pratique

L’exposition durera jusqu’au 4 juin au Musée de Tahiti et des îles.

Horaires d’ouverture : de 9 heures à 17 heures , du mardi au dimanche.

Le calendrier des visites guidées de 10h à 11h30 : 4 décembre, 11 décembre, 18 décembre 2021, 15 janvier, 29 janvier, 11 février, 12 mars, 26 mars, 23 avril,

14 et 21 mai 2022. Elles seront suivies de 11h30 à 13h par des séances de dédicaces des livres et signature des lithographies

Maximum 20 personnes.

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