Hiro’a n°168 – Le saviez-vous ? Bienvenue à Tahiti en 1956
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Le saviez-vous ? – Service du patrimoine archivistique et audiovisuel (SPAA) – Te Piha faufa ΄a tupuna
Bienvenue à Tahiti en 1956
Rencontre avec Jayson Tuihaa , chef de bureau du DPAMI au Service du patrimoine archivistique et audiovisuel. Notice – Fonds d’archives conservés au SPAA
En 1956, alors que la destination reste encore confidentielle, le Syndicat d’Initiative et du Tourisme de Tahiti édite un dépliant à l’usage des touristes anglophones.
« Pour ceux qui sont à la recherche du calme et de la simplicité, Tahiti est la terre idéale pour la détente et la joie de vivre. » Voilà ce qu’on peut lire dans le petit dépliant à l’usage des touristes anglophones édité par le Syndicat d’Initiative et du Tourisme de Tahiti en 1956. Réalisé par l’imprimerie Jean C. Ferrand, il comprend huit volets, imprimés recto-verso et compte huit illustrations, dont six en couleurs.
Que peut-on y voir et lire ?
On y découvre d’abord une carte « Pacific Ocean ». Celle-ci présente les lignes maritimes et aériennes qui permettent d’atteindre Tahiti. Par la mer, on détaille plusieurs routes et plusieurs compagnies :
– La Compagnie des Messageries Maritimes : deux paquebots modernes, le Tahitien et le Calédonien, faisant route toutes les six semaines via Alger, Madère, La Martinique, La Guadeloupe, Curaçao * et Panama, puis allant jusqu’à Nouméa et Sydney, et retour.
– L’American Pioneer and United Line : cargos transportant 12 passagers au départ de New-York chaque mois. Tarif : 450 $ de New-York à Tahiti.
– L’Union Steamship Company of New Zealand LTD. : cargos transportant de 4 à 12 passagers au départ de San Francisco et Los Angeles chaque mois.
– La Shaw Savill Line : un paquebot, le Southern Cross, avec une classe « touriste de luxe », faisant le tour du monde via Tahiti tous les trois mois.
– La Darr Lines : voyages réguliers toutes les sept semaines de et vers Honolulu – Papeete sur la goélette de luxe Te Vega.
– La Matson Line : cargos transportant 12 passagers au départ de San Francisco et Los Angeles. Tarif à partir de 300 $.
Deux paquebots modernes et climatisés, le Mariposa et le Monterey seront mis en service dans le Pacifique Sud en novembre 1956.
Par la voie des airs, trois compagnies desservent les E.F.O. à l’époque, les avions atterrissent à Bora Bora et seuls les hydravions rejoignent Tahiti.
– La Tasman Empire Airways LTD. (T.E.A.L.) : au départ de Nouvelle-Zélande vers Fidji, Samoa, Aitutaki et Tahiti toutes les deux semaines. Tarif de Fidji à Tahiti : 148 $.
– La Pan American Airways (P.A.A.) : de San Francisco et Los Angeles vers Honolulu puis Fidji. À Fidji, prendre la correspondance pour Tahiti avec la T.E.A.L.
– La South Pacific Airlines : ligne Honolulu – Tahiti.
Histoire et infos pratiques
On retrouve sur le dépliant une multitude d’informations pratiques et générales. Cela va des conditions d’entrée douanières aux taux de change en passant par la liste des restaurants et hôtels. Quatre hôtels sont d’ailleurs proposés : Chez Rivnac à Punaauia, le Grand Hôtel à Papeete, Les Tropiques à Papeete et Le Royal Tahitian Hotel à Pīra’e. Pour louer une maison, il faut se renseigner auprès du Syndicat d’Initiative. Dix restaurants sont référencés : Col Bleu, Cercle Polynésien, Chez Rivnac, Les Tropiques, Maeva, Manava, Royal Tahitian, Vaihiria, Waikiki et Yacht Club.
Les informations générales reprennent la classique description géographique et climatique des archipels, avec leurs îles hautes et basses. Il y a à l’époque 62 000 habitants, dont 53 000 Polynésiens et 6 000 Chinois. La meilleure saison est annoncée de mai à septembre. On rappelle aussi que Tahiti ne connaît aucune des grandes maladies tropicales et n’accueille aucune bête dangereuse ou venimeuse. La partie Histoire tient en quelques phrases rappelant les découvreurs (Mendana, Le Maire et Shouten, Roggewein, Wallis, Bougainville, Cook), la mutinerie sur le Bounty, le protectorat et la donation de Pomare V de ses États à la France. Il est rappelé que la littérature sur Tahiti est abondante, et quelques noms sont cités (Lord Byron, Chateaubriand, Victor Hugo, Pierre Loti, Robert Louis Stevenson, Nordhoff et James Norman Hall…), sans oublier le peintre Paul Gauguin.
De nombreuses activités répertoriées
On y lit aussi que pour se promener à Tahiti, « on peut louer des automobiles américaines ou françaises ; les visiteurs peuvent même apporter leur propre voiture, sans payer de taxes, à condition que la voiture reparte avec eux à la fin de leur séjour. On peut aussi louer des bicyclettes. » Pour un taxi, comptez 12 francs du kilomètre et les bus (il y en a une douzaine) sont très peu chers. Les agences Air-Tahiti Travel Agency et Iaorana Tours, elles, proposent des circuits.
D’après le dépliant, les arrêts incontournables de l’île sont le marae ‘Arahurahu, les grottes de Mara’a, la Tombe du roi Pomare V, le monument dédié à Cook à la pointe Vénus ainsi que le Musée de Papeete. On y vante les activités aquatiques : plongée avec masque dans les « jardins de corail », natation et ski nautique. On y détaille également toutes sortes de pêches : la pêche en haute mer, la pêche à bord d’une pirogue dans le lagon et la pêche au fusil-harpon. Sur terre, ce sont le tennis et l’équitation qui sont à l’honneur. Mais surtout, on invite les touristes à ne pas rater les fêtes du Tiurai.
Les formalités d’entrée
Les formalités d’entrée en Polynésie française pour les étrangers et les visiteurs sont simples : un passeport, un visa valable quatre mois et prolongeable deux mois, un dépôt à la Banque de l’Indo-Chine d’une somme garantissant le rapatriement vers son pays d’origine ou la présentation du billet retour. Les visiteurs étrangers ont l’obligation de déclarer les sommes d’argent apportées avec eux. En 1956, il faut entre 200 et 400 $ pour couvrir les dépenses normales d’un mois (le dollar américain vaut 64 francs-pacifiques, et le franc-pacifique vaut 5,50 francs métropolitains). Si les bagages sont inspectés, on peut apporter, sans payer de taxes, caméra, machine à écrire, bicyclette, voiture, ainsi que 400 cigarettes.
La nonchalance et la joie de vivre, la gentillesse et l’hospitalité tahitiennes font le bonheur des riches privilégiés qui ne se bousculent pas. Mais les temps vont changer. Bientôt arriveront le référendum d’autodétermination et toute l’agitation politique qu’il va susciter ; puis la construction de la piste et de l’aéroport de Fa’a’ā, avec l’installation du C.E.P. et les milliards qui vont se déverser sur le territoire, l’explosion démographique : la joie de vivre va devenir moins facile à trouver… ◆
Légende
Dépliant à l’usage des touristes anglophones. Tahiti 1956.