Hiro’a n°164 – L’œuvre du mois : Te parau Tu´ite Hanahana: exprimer son identité
L’œuvre du mois
Centre des Métiers d’Art (CMA) – Pu ha΄api΄ira΄a toro΄a rima΄i
Te parau Tu´ite Hanahana: exprimer son identité
Depuis 2017, le Centre des métiers d’art de Polynésie française dispense deux diplômes nationaux tout en ayant conservé son titre professionnalisant Te parau Tu΄ite Hanahana. Ce dernier permet au Centre de marquer son identité polynésienne et ses spécificités. La promotion 2021 arrive au terme de son parcours de formation et se prépare à exposer ses travaux. Un moment important pour ces 14 élèves qui ont déployé leurs ailes et grandi au fil des deux années au CMA.
Ce jour-là, dans la salle d’exposition du Centre des métiers d’art, on sent une certaine hésitation et beaucoup de tâtonnements. Comment gérer la scénographie et mettre en valeur les travaux de fin d’études afin de les présenter au public, s’interrogent les élèves. « Accrocher » des œuvres dans le cadre d’une exposition n’est jamais une mince affaire, et pour ces élèves de la promotion 2021, c’est avant tout une première. Depuis plusieurs semaines, ils travaillent sur leurs projets respectifs afin de valider le titre professionnalisant propre au Centre des métiers d’art, Te Parau Tu΄ite Hanahana. Ce titre maintenu aux côtés des formations diplômantes reconnait la formation unique et le savoir-faire polynésien.
Outils numériques
Papier, nacre, tissu, bois et même jeu vidéo… ils ont chacun choisi une matière, un support, pour raconter une histoire, délivrer un message. Ils ont utilisé tous les outils à leur disposition au sein de l’école, comme les outils numériques, en particulier la 3D, véritable outil de médiation dans leur art. C’est le cas de Nathalie Domenech qui a pu modéliser ses pièces et les imprimer en 3D pour son prototype de corset avant de se lancer dans la réalisation de 400 pièces en nacre, un travail fastidieux et exigeant de précision. Nathalie a choisi de travailler la nacre sur le thème du tressage en reproduisant le point de chevron.
Une réinterprétation des objets polynésiens
À travers la réinterprétation des objets du quotidien comme Léo Chassaing et ses cuillères en bois, Jason Soilouk et ses luminaires, ou le pōito sculpté de Heevai Tefaafana qui s’est intéressée à l’absence de l’eau et à ses conséquences sur nos vies, les élèves du CMA s’appuient sur une formation intense et une longue réflexion menée au sein du Centre sur leur culture, leur patrimoine. Certains poursuivront leur formation, d’autres démarreront leur activité professionnelle et pratiqueront leur art de prédilection, mais en attendant vous pouvez aller découvrir le fruit de leurs travaux et les encourager dans le cadre de cette exposition qui se tient à partir du 25 juin jusqu’au mois de septembre 2021, attention le CMA ferme de la mi–juillet à la mi-août 2021.
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Léo Chassaing, BPMA 2 en sculpture
« Je voulais me réapproprier un objet du quotidien comme la cuillère, et en faire un objet repensé à partir de formes traditionnelles de la culture polynésienne. J’ai choisi des formes assez épurées et j’ai décortiqué leur construction de profil et de face. J’ai prélevé ces formes pour en faire une composition sans jamais y intégrer de gravure. Seules les formes et les essences de bois local, comme le miro, l’acajou ou le ΄ati (le bois de tāmanu, ndlr) mettent en valeur la cuillère. »
Le siège de Mai, très incurvé, a inspiré la première cuillère. Puis c’est à partir de la forme d’un battoir que Léo a imaginé sa deuxième cuillère. Un ΄ūmete et la toiture d’un fare traditionnel seront également une source d’inspiration pour le jeune homme qui souhaite poursuivre dans l’ébénisterie et rejoindre les Compagnons du devoir.
Cathy Daguenet, BPMA 2 en gravure.
« Je voulais présenter des outils de notre patrimoine culturel, mais aussi la transmission de ce patrimoine à travers le patchwork et le tīfaifai, l’art de nos mamans. J’ai donc choisi l’impression sur tissu à partir de la technique de la linogravure qui consiste à graver sur une plaque de lino, soit les vides, soit les pleins, et d’en faire un tampon. Sur ma plaque au format A4, se trouvent des reproductions d’outils de gravure, un ΄ūmete, le dieu A΄a… que j’ai reproduit indéfiniment sur le tissu de 6 mètres de long, parfois même en superposant l’impression. Il m’a fallu quatre jours de travail. J’ai également utilisé les plis du tissu pour donner du relief et des dégradés de marron, clin d’œil au tapa. On a tendance à limiter la gravure à la nacre, mais moi je voudrais développer l’impression sur tissu à partir de cette technique. »
Cathy a également réalisé un jeu vidéo style Dino pour rendre les œuvres du patrimoine plus accessibles aux jeunes. Le jeu pourrait être, par exemple, téléchargé sur un téléphone.
Jason Soilouk, BPMA 2 en gravure
« Mon projet d’étude a pour racine un arbre qui fait partie de l’histoire polynésienne : le bancoulier. Parmi ses nombreuses propriétés, la noix servait autrefois de combustible et donc d’éclairage naturel. C’est sur cet aspect que j’ai développé mon projet en réalisant des lampes individuelles d’ambiance à partir de compositions en origami. Pour le côté translucide, j’ai choisi de travailler le soji, mais aussi la résine avec l’impression 3D. »
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PRATIQUE
Exposition de la promotion 2021 de juin à septembre
- Les inscriptions à l’examen d’entrée au BPMA, Baccalauréat pro des métiers d’art polynésien et CPMA, Certificat des métiers d’art polynésien, sont ouvertes jusqu’au30 juin, de 8h à 15h30. Vous pouvez retirer un dossier sur place auCMAPf, à l’angle des avenues Régent Paraita et Georges Clemenceau, à Papeete ou télécharger le formulaire en ligne (www.cma.pf)
- Renseignements en téléphonant au 40 437 051 ou sur la page FB du centre des métiers d’art de la Polynésie française.