Hiro’a n°163 – Dossier : Une symphonie de variété pour les divas du fenua
Dossier
Conservatoire artistique de Polyn ésie française (CAPF) – T e Fare Upa Rau
Rencontre avec Frédéric Rossoni, arrangeur et chef d’orchestre au CAPF, Christine Bennett, pro fesseure d’art dra matique au CAPF, Frédéric Cibard, chargé de communication au CAPF et les six divas : Noé mie, Lylia, Tinalei, Reva Juventin, Reia Poroi et Kareen Yu Tsuen. Texte Pauline Stasi – Photos : Ch. Molinier pour CAPF/2021, S. Sayeb pour CAPF 2019 et Pauline Stasi
Une symphonie de variété pour les divas du fenua
Ouvrez vos agendas ! Vous avez rendez-vous les 21 et 22 mai prochains pour deux soirées exceptionnelles à l’occasion du Concert des divas du fenua. Six chanteuses, chacune avec un timbre de voix bien à elle, interprèteront des grands tubes de la variété française, accompagnées par l’orchestre symphonique du Conservatoire dirigé par Frédéric Rossoni. Une belle évasion de près de deux heures pour le public du Grand théâtre qui pourra se plonger dans les univers de Juliette Gréco, de Johnny Hallyday, d’Édith Piaf ou encore de Francis Cabrel, de Michel Delpech, de la plus célèbre des Québécoises, Céline Dion, et de bien d’autres encore.
Après avoir amené la fièvre du disco au Grand théâtre et fait fondre le public au son de Love me tender d’Elvis Presley et de Love me do des Beatles, Frédéric Rossoni nous entraine cette année dans un autre univers musical, celui de la variété française des années 1950-60 jusqu’à aujourd’hui. Cela fait plus d’un an que le musicien, chef d’orchestre, et professeur au Conservatoire artistique de la Polynésie française, travaille en amont sur ce projet de concert au féminin. « Fabien Dinard (ndlr : directeur du Conservatoire) m’a parlé un jour d’un concert des quatre divas de Las Vegas avec Céline Dion, je crois. J’ai trouvé cette idée de concert de plusieurs chanteuses intéressante. Je me suis dit qu’il serait aussi intéressant de faire un grand concert de variétés françaises. J’ai mixé ces idées. On a proposé à trois jeunes talents du Conservatoire, Noémie, Tinalei et Lylia, et trois chanteuses adultes confirmées, Reva Juventin, Reia Poroi et Kareen Yu Tsuen, de participer à ce concert. Sans esprit de compétition ou de battles bien sûr, mais plutôt dans l’idée de marraines. Le titre, “Le concert des divas du fenua”, n’est surtout pas péjoratif, mais fait référence à la qualité de leurs voix », explique Frédéric Rossoni.
Un long travail d’orchestration
Chacune des six chanteuses a alors pro – posé au maestro plusieurs titres en fonction de leurs affinités musicales et de leur timbre de voix. « J’ai ensuite beaucoup travaillé sur l’orchestration, l’arrangement des différents morceaux pour qu’ils puissent être joués par un orchestre symphonique (…). J’ai aussi pris en compte le tempo des différents morceaux pour l’enchainement des titres afin que le concert soit bien rythmé pour le public », précise Frédéric Rossoni. Hallyday, Cabrel, Delpech, Dion, Gréco, mais aussi Cœur de pirate, Amel Bent ou Juliette Armanet… et même des compositions personnelles de Reva Juventin ou de la jeune Tinalei, la variété sera bien au rendez-vous les 21 et 22 mai au Grand théâtre.
Même si, à elles trois réunies, elles n’ont pas plus de quarante ans, Noémie, Tinalei et Lylia ont déjà un beau parcours derrière elles et ont, chacune, sorti des singles. Toutes trois sont élèves de Bruno Demougeot, coach vocal au Conservatoire. « Noémie a une vraie gouaille française dans son timbre, Tinalei a une voix lyrique, de comédie musicale, et Lylia est davantage soul, jazz, c’est étonnant d’ailleurs à son âge. Kareen, Reva et Reia ont aussi des voix superbes », relève le maestro. Et c’est soutenu par les instruments à cordes, à vent et les percussions de la cinquantaine de musiciens qui compose l’orchestre symphonique du Conservatoire, et de la section rythmique électrique de l’Établissement, que ces six divas du fenua interpréteront une vingtaine de chansons pour ce concert événement.
Un bistrot parisien
Si la partie musicale entre l’orchestre symphonique et les chanteuses promet assurément de séduire avec sa diversité de titres et les voix des divas, la mise en scène proposée par Christine Bennett apportera sans doute une dimension encore un peu plus festive à cette soirée. Professeure de théâtre au Conservatoire, Christine Bennett a imaginé et conçu toute une scénographie autour d’un bis – trot parisien où un barman et des serveuses introduiront les chansons interprétées lors de courts intermèdes, un peu comme des brèves de comptoir. Les divas pourront, entre deux titres, s’attabler au bar. Un juke-box servira de lancement aux différentes chansons. Barre de pole dance, démonstration de hip-hop du groupe All in one ou encore de danse classique viendront compléter ces intermèdes.
Christine Bennett prévoit également de grands écrans vidéo qui diffuseront les images des musiciens pour valoriser également l’orchestre symphonique. « On essaye de faire quelque chose de vivant, de gai, de mettre en valeur le Conservatoire, les artistes, les chanteuses, les musiciens », lance la professeure de théâtre, visible – ment heureuse de participer à ce beau projet. En charge de la communication au Conservatoire artistique de la Polynésie française, Frédéric Cibard résume en une phrase tout l’esprit de ce concert des divas du fenua : « Ces soirées présentées au public seront vraiment un beau spectacle, un spectacle qui a un corps, une âme. De quoi redonner le sourire à tous ! ».
PRATIQUE
Au Grand théâtre de la Maison de la culture
- Vendredi 21 et samedi 22 mai à 18h30
- Tarifs : 2 500Fcfpadulte, 1 500 Fcfp moins de 12 ans
- Billets en vente au conservatoire et sur place le soir du Concert + d’infos : www.facebook.com/capftefareuparau, www. conservatoire.pf etwww.maisondelaculture.pf
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Les divas se dévoilent :
Du côté des jeunes talents
Lylia, 12 ans
« J’ai découvert la musique par le biais de ma mère qui chante beaucoup, notamment à l’église. Je me suis aperçue que chanter la rendait heureuse, alors, j’ai voulu faire pareil et c’est comme cela que je me suis mise à chanter à la maison. Depuis un peu plus d’un an, je suis les cours de chant de Bruno Demougeot au Conservatoire, j’apprends vraiment beaucoup de choses, de techniques avec lui.
J’ai plutôt une voix de soprano. Je vais interpréter pour ce concert des chansons de Ben l’oncle Soul, d’Olivia Ruiz et de Jacques Brel, ce ne sont pas forcément des chanteurs que je connais très bien et que j’écoute beaucoup, mais j’aime bien. J’écoute pas mal de musiques, cela peut aller de Florent Pagny à Taylor Swift.
Je suis déjà montée deux fois sur scène pour les Nuits du jazz au Petit théâtre et pour le concert de Natihei au Grand théâtre. J’aime vraiment cela, je suis contente de remonter sur scène, surtout avec un tel orchestre. C’est assez impressionnant de chanter avec un orchestre symphonique, avec tous ces musiciens, c’est vraiment un honneur. »
Noémie, 13 ans
« Je vais interpréter Petite Marie, c’est une chanson de Francis Cabrel que j’aime beaucoup. Je vais aussi chanter Ma philosophie d’Amel Bent, c’est une chanson engagée. Enfin, j’ai choisi de chanter Comme des enfants de Cœur de pirate, pour ma mère, car elle apprécie beaucoup cette chanson. Côté musique, j’aime beaucoup de choses. La musique anglaise pop, tahitienne ou encore le classique comme le requiem Lacrimosa de Mozart. Je joue du ΄ukulele, de la guitare et je commence à apprendre le piano.
J’avoue que chanter en étant accompagnée par un orchestre, c’est très impressionnant. Au début, j’ai eu un énorme trac, même si cela va un peu mieux maintenant. J’ai peur de faire des fautes. Après, c’est une superbe aventure. »
Tinalei, 14 ans
« Je vais interpréter trois chansons en solo. L’amour en solitaire de Juliette Armanet, Être à la hauteur d’Emmanuel Moire, extrait de la comédie musicale Le roi soleil et Poison, que j’ai composée moi-même. Je vais aussi chanter en duo Tu es mon autre de Lara Fabian et Maurane.
C’est magique de chanter avec un orchestre. J’adore le titre Être à la hauteur. La musique de cette chanson jouée par un orchestre symphonique fait vraiment ressortir les tonalités de la chanson initiale. Auparavant, la tonalité était trop basse pour moi, je n’arrivais pas bien à chanter dessus ; grâce à l’orchestre, c’est juste la bonne tonalité pour moi.
C’est sûr que c’est impressionnant de jouer avec un orchestre, car beaucoup de personnes te regardent, mais je connais la majorité des musiciens, car j’ai déjà fait partie du grand orchestre.
J’ai écouté beaucoup de classique quand j’étais petite, j’apprécie toujours d’ailleurs, mais je suis maintenant davantage orientée vers la pop, notamment la K-pop. J’aime aussi beaucoup le lyrique, et le fait d’aller au concours des voix de l’Outremer en janvier m’a permis d’élargir mes goûts musicaux. Je suis contente aussi de chanter de la variété française, car j’ai appris à chanter avec cela. »
Du côté des chanteuses confirmées
Reva Juventin
« Ma mère est chanteuse et mon père est très mélomane, il mettait beaucoup de vinyles, de CD, j’ai grandi dans cette ambiance musicale, c’est comme cela que m’est venue la passion pour le chant. J’ai commencé à comprendre que j’arrivais à chanter quand je me suis mise à copier les chansons de Mariah Carey, j’aime beau – coup le RnB. Je le faisais en cachette dans ma chambre. À l’âge de dix-sept ans, j’ai participé au Penu d’or organisé par Gaby Cavallo, puis j’ai enchainé avec la troupe du Penu d’or. Je me suis ensuite inscrite au Conservatoire. Parallèlement, j’ai fait partie de plusieurs groupes : Veroia, Coconut jazz. Le jazz m’a permis de mieux m’affirmer. Je connaissais très mal ce style de musique, cela me paraissait très technique, mais dès que j’ai commencé, cela m’a vraiment beaucoup plu. Ma voix est plutôt douce, je n’ai pas une voix de rockeuse, le jazz me permet de m’exprimer.
C’est la première fois que je chante avec un orchestre symphonique. Lors de la première répétition, j’ai vraiment eu le trac avec tous les musiciens. Pour ce concert, je vais interpréter la version de Lara Fabian de la chanson de Serge Lama, Je suis malade. C’est une chanson que j’ai toujours voulu chanter depuis que je suis toute petite, mais je n’avais pas le coffre auparavant pour y parvenir. C’est un peu un défi. Je vais aussi interpréter Ce n’était qu’un rêve de Céline Dion, écrite par la mère de Céline Dion pour sa fille, et chanter une de mes compositions Oh Paris, dans laquelle j’évoque mon premier voyage à Paris en janvier 2019 pour participer au concert de Gabilou, “La bringue à L’Olympia”. C’était la première fois que je venais en France, je n’y suis restée que six jours, mais cela a été extrêmement fort émotionnellement. Au retour, j’ai écrit cette chanson et la mélodie que j’ai ensuite retravaillée avec Bruno Demougeot. Dès que je chante cette chanson, cela me ramène là-bas. »
Kareen Yu Tsuen
« Je vais interpréter trois chansons en solo. Que je t’aime de Johnny Hallyday, Destin de Céline Dion et Pour un flirt de Michel Delpech. Ce sont des titres que j’interprète régulièrement avec mon band, le Natura Jam. Mais c’est évident que c’est très différent de les interpréter accompagnée d’une batterie, une basse et une gui – tare ou avec un orchestre symphonique. Je souhaite vraiment remercier Frédéric Rossoni et Fabien Dinard de m’offrir cela. C’est un grand privilège, ce n’est pas don – né à tout le monde de jouer avec un tel orchestre. Je suis heureuse d’avoir cette chance. »
Reia Poroi
« Je vais interpréter Aimer jusqu’à l’impossible de Tina Arena, Tu es mon autre de Maurane et Lara Fabian en duo avec Tina – lei et un medley de La javanaise et Jolie môme. C’est vrai que je chante beaucoup de musiques polynésiennes d’antan, c’est important de préserver ces chansons qui font partie de notre patrimoine. Après, je ne chante pas que cela, j’aime aussi beaucoup le jazz, le rap, les musiques française, anglaise, internationale… Je fais partie d’un groupe de musique qui s’appelle Tahiti jazz feeling.
J’ai déjà participé il y a deux ans au concert “Disco fever”. Je me souviens que c’était très impressionnant de jouer avec l’orchestre symphonique du Conservatoire. Je suis autodidacte, et j’en avais la chair de poule de jouer devant tous ses musiciens, c’était vraiment une expérience extraordinaire. Je suis vraiment très contente de pouvoir revivre cette expérience, cela fait sortir de sa zone de confort. »