Hiro’a n°160 – l’oeuvre du mois : HTJ voit grand !
Musée de Tahiti et des îles (MTI) – Fare Manaha
Texte : Vaea Deplat – Photos : V.D., Présidence de la Polynésie française
HTJ voit grand !
Hell Ton John, aujourd’hui plus connu sous l’acronyme HTJ, n’est plus à présenter. Artiste graphiste et graffeur prolifique renommé du fenua, il participe à l’exposition « Fa΄aiho, ta΄u tufa΄a, regards d’artistes contemporains » visible au Musée de Tahiti et des îles jusqu’en avril 2021. Il y présente trois œuvres monumentales en techniques mixtes : ΄Avei΄a, repère pour la navigation, Relique et Ligns, toutes conçues spécialement pour l’événement.
Pour toute personne familière des planches de surf sculptées et peintes qui incarnent la signature de l’artiste, HTJ surprend le visiteur avec trois œuvres à contre-emploi de ses créations habituelles dans le cadre de l’exposition à découvrir actuellement au Musée de Tahiti et des îles. Pour autant, on y retrouve son style développé depuis dix ans et « inspiré par l’univers du surf, mêlant références urbaines et polynésiennes, qu’il transpose dans un langage coloré et volubile. Planches, toiles, murs sont ses supports d’expression, avec une nette prédilection pour le “grand” », confirme le catalogue de l’exposition. Une Relique hors-échelle La première œuvre, centrale compte tenu de sa taille magistrale, a d’ailleurs été la toute première à être installée dans l’exposition. Peinture, graffiti et collage recouvrent un décor de théâtre abimé d’il y a vingt ans, qu’il a fallu remettre sur pied. On y reconnait tout de suite un Ti’i dont le côté droit est brut, neutre, uni, et le côté gauche envahi par une multitude de logos de toutes sortes représentant la modernité, l’hyperconsommation et les médias. « Avec une œuvre aussi imposante, la perception du spectateur est complètement différente lorsqu’il est plus petit qu’elle. C’est l’interaction entre des grandes pièces et le récepteur qu’il m’intéresse de provoquer. »
Depuis longtemps, l’artiste rêvait de réaliser des œuvres monumentales, mais l’espace restreint des galeries d’art ne le lui permettait pas. La spacieuse salle d’exposition temporaire, elle, s’y prête et abrite donc Relique – pas moins de 4 mètres de haut – qui constitue une pièce maîtresse parmi les trente-six œuvres présentées. L’artiste connait bien ce qu’il considère comme « la plus belle salle de Polynésie », il y a déjà exposé par le passé – à l’occasion de l’exposition « Prise de Terre » réunissant quarante artistes contemporains par l’association Trans Pacific art en 2012 puis lors d’une des expositions de photographies « Hoho’a ». Ici, l’imposante Relique répond au Tiki marquisien de l’entrée, le plus grand en bois encore existant aujourd’hui, apprendon lors des visites guidées (lire encadré Pratique).
Une rose des vents revisitée
Pour la deuxième œuvre, ΄Avei΄a ou les repères de navigation, « l’idée était d’aborder le support du surf différemment. Cette fois-ci, j’ai décidé de ne pas sculpter mes planches mais de rester davantage dans l’installation », explique HTJ. Ce travail de dessin vectoriel, usiné par Tahiti Signs, est une création numérique avec l’aide de la machine pour la gravure. « J’ai fait exprès de garder des tails (arrière d’une planche) avec des grips (formes autocollantes qui permettent d’avoir un appui pour le pied arrière) pour le côté brut et en relief. Initialement, j’étais parti sur l’idée du mandala, et, fidèle au thème de la navigation proposé par le Musée, j’ai donc dérivé sur la boussole des vents avec ces oiseaux au milieu qui nous montrent le chemin. » L’artiste n’a finalement sculpté que l’élément central qui correspond d’ailleurs aux seules couleurs chaudes de l’œuvre sur le thème de la pirogue à voile traditionnelle. Le reste, tout en relief, reprend d’autres symboles de l’iconographie polynésienne, invitant aux rêveries du voyage.
Ligns, un triptyque de coulures en one line
La troisième œuvre en triptyque s’inspire du principe du one line, des coulures de peinture en glycéro sur la toile au sol. « Je crée à la suite pour qu’il y ait le même jet, je construis d’abord des grandes lignes sur les trois parties, pour ensuite rentrer dedans au fur et à mesure et ainsi de suite. Avec cette technique, tout est dans la gestuelle. » On retrouve dans cette œuvre acquise par le Pays, la fréquence et les vibrations pour la musique, l’ornement, les tiki, la navigation : des détails de l’œuvre qui apparaissent au fur et à mesure que le regard s’y plonge et s’y attarde. « Devant une peinture grand format, c’est tout le corps qui bouge », précise l’artiste qui a par ailleurs été agréablement surpris par ses échanges, au lancement de l’exposition, avec les élèves du Centre des métiers d’art qui exposent à ses côtés [Omaira Tuihani, Here, Ninirei Temaiana, Yvenka Klima] : « Ça fait plaisir parce qu’on sent une véritable motivation et elles vont au bout des choses, il y a une belle énergie. Elles ont une véritable production structurée. » L’actualité 2021 d’HTJ prévoit également une participation mi-avril à l’exposition « Hamani Lab », le laboratoire artistique et collaboratif de la vallée de Tipaerui à la galerie Winkler, et mi-août pour une expo solo.
PRATIQUE
Exposition « Fa΄aiho, ta΄u tufa΄a, regards d’artistes contemporains »
- Jusqu’au 25 avril, Musée de Tahiti et des îles
- Retrouvez 22 artistes rassemblés autour de 4 thématiques et des collections du Musée de Tahiti : A΄amu, Alexander Lee, Carine Thierry, Cronos, Gaya, Gotz, Here, HTJ, Jean-Paul Forest, Kala΄i Shigetomi, KNKY, Libor Prokop, Ninirei Temaiana, Omaira Tuihani, Patricia Bonnet, Robert Toa, Sébastien Canetto, Stéphane Motard, Tahe, Teva Victor, Tvaite, Yvenka Klima.
- Ouvert du mardi au dimanche, de 9 heures à 17 heures
- Visite guidée tous les vendredis à 15 heures pour des groupes de 5 personnes maximum, mais uniquement sur réservation préalable à [email protected] ou au 87 790 797
- Catalogue de l’exposition disponible à la billetterie pour 1 500 Fcfp
- Toutes les informations sont également disponibles sur : https://www.museetahiti.pf/evenements/faaiho-tau-tufaa/
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