Hiro’a n°158 – Le saviez-vous : Gravure, peinture, écriture : Ninirei Temaiana ose tout

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LE SAVIEZ-VOUS ? – Centre des Métiers d’Art (CMA) – Pu ha΄api΄ira΄a toro΄a rima΄i

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Gravure, peinture, écriture : Ninirei Temaiana ose tout

Rencontre avec Ninirei Temaiana, ancienne élève du Centre des métiers d’art. Texte et photographies : Lucie Rabréaud

Après avoir étudié pendant trois années au Centre des métiers d’art, Ninirei Temaiana est autoentrepreneure. Elle crée des bijoux en nacre et expose ses peintures tout au long de l’année.

« L’art est vivant sous toutes ses formes. » La citation de Ninirei est inscrite sur sa carte de visite et elle est parfaitement représentative de son travail. Gravure, peinture, écriture et jardinage ! L’art est présent dans toutes les activités de Ninirei. Cette créatrice de bijoux et artiste-peintre voulait d’abord être architecte mais elle change de voie après une déception amicale et passe finalement un Bac pro en secrétariat. Pas du tout ce qu’elle aime ! Une fois le diplôme en poche, elle cherche du travail et vit entre Tahiti où habite sa mère fa΄a΄amu et sa grand-mère et Ua Pou où vit son père. « J’étais un peu perdue, j’allais à droite, à gauche, je n’arrivais pas à me stabiliser », raconte-t-elle. Deux années sabbatiques où elle se cherche elle-même… C’est un ami, artiste aussi et élève au Centre des métiers d’art, qui lui parle du CMA et l’incite à passer le concours. Ninirei Temaiana a toujours aimé dessiner et elle a plein de carnets à présenter. « Pour moi, c’était revenir aux sources. » Elle tente le coup, se retrouve sur liste d’attente mais n’est pas prise. « J’ai envoyé tous mes carnets à ma sœur, je ne voulais plus dessiner. Cet échec m’avait refroidie. » L’année suivante, elle repasse le concours, poussée par son ami qui croit en elle. « J’ai seulement ramené un petit carnet mais surtout j’ai affirmé ma motivation à l’oral face au jury. Je leur ai dit que j’étais sérieuse et motivée ! » Elle est prise. « J’étais carrément contente ! J’ai dansé ! se souvient-elle. C’était comme un nouveau départ. Je retrouvais le sens de l’orientation, j’allais apprendre de nouvelles choses. »

Apprentissage et perfectionnement

La première année au CMA est une découverte : histoire, culture, arts plastiques, gravure, sculpture… La deuxième année, elle choisit la gravure où elle pense pouvoir plus facilement créer et vendre. La troisième année, elle se perfectionne et prépare son œuvre de fin d’année pour le diplôme. Elle présente un lustre en nacres. « Je voulais proposer quelque chose qui ne se voyait pas ailleurs et j’ai fabriqué des prismes avec des carrés de nacre d’un centimètre. Je pensais y arriver toute seule mais finalement des étudiants de première année de l’école m’ont aidée. » Elle choisit le lustre car c’est un objet prestigieux et esthétique et c’est le support idéal pour approfondir son travail sur les formes géométriques et sa technique d’assemblage de ligatures. La nacre apporte de la valeur par sa forme en prismes et ses couleurs. « Le jury a trouvé l’objet très intéressant mais pas suffisamment abouti. Il m’aurait fallu plus de temps pour les finitions. » Mais Ninirei est contente. Elle n’est pas du genre à dénigrer son travail : « J’aime tout ce que je fais. Je ne suis pas fière mais consciente de ce que je fais et j’apprécie mon travail. »

Et elle a obtenu son diplôme. Elle avoue avoir beaucoup appris pendant ces trois années au Centre des métiers d’art. « Je ne connaissais pas la gravure, la nacre, ni même les bases en peinture avec les couleurs primaires. Nous devions parfois croquer en quelques minutes une scène, ou bien travailler sur un sujet et le décliner à notre façon. Il ne s’agissait pas de dessiner comme ça, il fallait réfléchir à son travail. Viri Taimana (le directeur du CMA, ndlr) est très exigeant sur nos dessins et sur notre réflexion. J’ai participé à de nombreux projets comme des expositions. J’ai appris beaucoup de choses sur la culture… »

La création en liberté

Le CMA terminé, son diplôme en poche, Ninirei hésite entre trois options : rejoindre l’atelier Prokop où elle a fait un stage, s’installer comme autoentrepreneure ou poursuivre ses études d’art en France. Ce sera la deuxième. « J’aime le travail d’équipe mais je voulais ma liberté de création. Je continue à aller à l’atelier Prokop, Woita est un mentor pour moi. Il me donne des conseils en gravure mais aussi sur mes tableaux. » Cela fait désormais une année qu’elle est à son compte. Elle propose des bijoux en nacre et expose régulièrement avec les anciens élèves du Centre des métiers d’art lors d’expositions collectives. Toujours des tableaux abstraits qu’elle crée avec des coulures de peintures et le sèche-cheveux. Elle se fixe un thème, imagine une forme, des couleurs et se lance. « J’essaye de maintenir une harmonie. » Quelques tableaux dans son atelier sont posés, comme en attente. Ninirei ne les a pas encore achevés. La base est là mais une suite est à venir. Elle commence aussi à travailler le figuratif en reprenant des tableaux connus comme ceux de Bobby. Elle aimerait mélanger les arts : figuratif, abstrait, pour un nouveau challenge. Créer et gérer sa propre entreprise est aussi un dé.fi : il ne faut pas seulement créer, il faut communiquer, gérer ses comptes, s’occuper des documents administratifs… Mais Ninirei semble heureuse d’avoir choisi d’ouvrir sa patente. Elle suit les pas de son père qui lui-même est graveur et a fait le CMA – enfin, il y resté seulement trois mois car « il est terrible », s’en amuse-t-elle. Une petite pluie vient rafraichir le jardin, c’est l’heure d’aller voir comment se portent les plants de haricots longs, de poivrons, de basilic, d’œillet d’Inde… Prendre l’air, s’immerger dans la nature, et s’inspirer.

PRATIQUE

• Il est possible de voir le travail de Ninirei à l’exposition « Fa’aiho ta’u tufa’a » du Musée de Tahiti et des îles où elle présente une expression revisitée du collier de cheffesse de Rurutu (en nacre, os et fibre de coco) ; à la galerie du Chevalet lors d’une exposition collective prévue en décembre (il faut prendre contact avec la galerie et s’inscrire pour visiter l’exposition).

Ou sur sa page Facebook : N I N I R E I.

Légendes

Acceptation. Le cœur prend forme par la façon de ressentir.

Espace. Il est en Soi un lieu plus subtil.

Dévotion. Être vrai envers Soi-même.

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