Hiro’a n°157 – Pour vous servir : Storytelling : un cours d’excellence en reo tahiti

Pour vous servir

Conservatoire artistique de Polynésie française (CAPF) – Te Fare Upa Rau

 

Storytelling : un cours d’excellence en reo tahiti

 

Rencontre avec John Mairai, enseignant au Conservatoire artistique de la Polynésie française. Texte : Lucie Rabréaud – Photo(s) : Lucie Rabréaud et CAPF

 

Depuis la rentrée, le Conservatoire artistique de la Polynésie française propose un nouveau cours en reo tahiti : le storytelling. Pour John Mairai, l’enseignant, il s’agit d’élever la qualité de maitrise du tahitien jusqu’à trouver l’excellence.

 

Être pris par une histoire, se laisser emporter par le récit de quelqu’un, rire et pleurer en écoutant un scénario rocambolesque plein d’émotions… C’est le pouvoir du storyteller ou, en version française, de l’accroche narrative. Le storytelling est l’art d’emporter son auditoire, de le convaincre, de l’emmener dans son récit, de le transporter dans une autre dimension. Depuis la rentrée, le Conservatoire artistique de la Polynésie française propose un cours de storytelling en reo tahiti. Une nouveauté à laquelle John Mairai, enseignant, pensait depuis plusieurs années. Lui-même auteur, acteur et storyteller, il voyait la progression des langues du Pacifique et le retard que prenait celle de Tahiti. Il fallait lui redonner de l’élan, promouvoir l’excellence et amener la pratique du reo tahiti à un niveau plus élevé qu’aujourd’hui. Il se souvient encore de ces journées d’enfance, passées entre copains et cousins, où l’un d’entre eux en particulier refaisait les films et captivait toute la bande. Tous parlaient tahitien alors. La langue a continué à être promue mais surtout à travers le ’ōrero : « On a privilégié le ’ōrero avec la renaissance culturelle. C’est une prise de parole au-dessus du lot, c’est quelque chose d’un peu hiératique. » Remettre le storytelling au goût du jour, c’est s’inspirer des Hawaiiens et notamment du célèbre Moses Goods, un acteur et un professionnel du storytelling, qui joue et raconte en anglais et en hawaiien. Après l’avoir vu au festival Polynesia de 2016, John Mairai, subjugué, a laissé germer l’idée du storytelling en reo tahiti.

 

Prendre la parole en public et réussir à captiver son auditoire demandent beaucoup de travail : « Le but du storyteller est d’émouvoir son auditoire, de faire comprendre une situation. Ça peut être culturel, sportif, financier… Il faut qu’il maitrise plusieurs techniques », résume John Mairai. Avoir un vocabulaire riche, une élocution parfaite, de la flamboyance, de la mémoire, de la présence sur scène, une fluidité dans le récit, réussir à ne pas perdre le fil de son histoire et avoir une chute. Beaucoup de paramètres qui font du storyteller un maitre de sa langue ! Une quinzaine d’élèves ont commencé les premiers cours du CAPF. Tous pratiquent le reo tahiti et veulent désormais atteindre l’excellence. « Nous avons commencé par des exercices de dictions. Certains ont des problèmes d’élocution, beaucoup de fautes deviennent des habitudes et ce sont des parasites dans le langage. Il faut réapprendre certains mots. Cela passe par des phrases à répéter, une vingtaine existe en tahitien. » L’équivalent de ce genre de phrase compliquée : « Un chasseur sachant chasser doit savoir chasser sans son chien. » Il faut ensuite travailler sa présence et son imagination. Même si le texte est préparé, il faut savoir improviser. Les élèves de John Mairai ne viennent pas prendre des cours de tahitien mais approcher la langue d’une nouvelle manière.

 

Ces cours permettent d’accéder à un niveau élevé de reo tahiti mais aussi d’apprendre à argumenter, à raconter, à emporter son auditoire. L’oralité est la base de nombreuses cultures du monde, le storytelling, que John Mairai appelle fa’ati’a parau (faire debout la parole) revient finalement à l’essentiel : prendre la parole et faire entendre sa voix.

 

Pratique

Conservatoire de la Polynésie française

Tél. : 40 501 414

www.conservatoire.pf/

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