Hiro’a n°149 – Le saviez-vous ? Unesco : premiers pas encourageants pour les Marquises
149
LE SAVIEZ-VOUS ? – Direction de la culture et du patrimoine (DCP) – Te Papa hiro ΄a ΄e Fau fa ΄a tumu
Unesco : premiers pas encourageants pour les Marquises
Rencontre avec Anatauarii Leal-Tamarii, archéologue à la Direction de la Culture et du Patrimoine. Texte : C.R. – Photos : DCP
Une nouvelle mission a eu lieu aux Marquises dans le cadre de la pr.paration de l’inscription de l’archipel au patrimoine mondial de l’Unesco. L’occasion de présenter les sites retenus aux experts nationaux, qui ont pu juger par eux-mêmes de l’adhésion de la population au projet, et dispenser des recommandations sur la constitution du dossier.
« Intense ». C’est le mot qui vient à la bouche des participants pour qualifier la mission qui a eu lieu aux Marquises du 21 novembre au 3 décembre dernier. Une délégation d’une quinzaine de personnes s’est rendue sur l’ensemble des sites retenus dans le cadre du dossier de candidature de l’archipel à l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco. Une visite très attendue aux Marquises puisqu’elle accueillait, en plus des techniciens en charge du dossier (lire encadré), trois experts mandatés par le Comité national des biens français du patrimoine mondial (CNBFPM). Car, avant de présenter le dossier devant la communauté internationale, c’est à Paris qu’il faut convaincre. En avril dernier, ce même comité avait validé les grandes orientations du dossier marquisien. Et c’est encore devant le CNBFPM que la Polynésie devra, en juin prochain, présenter les délimitations des sites pour l’inscription. « Une étape très importante », commente Anatauarii Leal-Tamarii, archéologue à la DCP. « On a essayé, bien sûr, d’en mettre plein la vue aux experts. Mais c’était surtout une mission d’aiguillage. Comme les spécialistes qui ont été invités par le Pays, ils étaient là pour nous donner des indications pour la suite. »
Hiva Oa, Nuku Hiva, Ua Pou, Fatu Hiva… Suivant le parcours établi lors des deux missions préparatoires, la délégation s’est rendue sur chaque « composante » du dossier. Des zones où se côtoient sites archéologiques et espaces « à fort intérêt environnemental ». « On va présenter ce que l’Unesco appelle un bien “mixte en série” », reprend Anatauarii. « L’idée, c’est qu’il y ait un dialogue entre la nature et la culture dans ce dossier. C’est là que réside la valeur universelle exceptionnelle des Marquises. »
Tri dans les sites et échanges avec les Marquisiens
Évaluer l’intégrité et l’authenticité de chaque site, définir les périmètres du bien et des zones tampons… Entre les techniciens et les experts, les discussions ont été riches. Elles ont d’ailleurs permis d’effectuer un « dernier tri » entre les sites qui seront inclus dans le dossier. « Certains ont été confirmés, d’autres écartés parce qu’ils posaient un problème (restauration trop lourde par le passé, proximité urbaine ou de voirie…) », explique l’archéologue. « Mais nous avons maintenant une idée claire des sept composantes que nous allons présenter en juin. » Un travail qui s’est bien sûr appuyé sur les Marquisiens. « On avait déjà vu les maires mais, cette fois, on a pu discuter sur chaque île avec les associations culturelles, les propriétaires terriens, les riverains », continue Anatauarii, qui consacre sa thèse aux tohua de l’archipel. « Tout le monde a pu poser des questions aux experts, sur la propriété des terres, les retombées économiques, touristiques, ou sur les obligations liées à une inscription… » Un échange qui a permis aux représentants du comité national de jauger l’adhésion des Marquisiens au projet Unesco. « La population doit être porteuse, c’est une condition sine qua non dans le processus d’inscription », insiste l’agent de la DCP, qui estime que l’échange avec les experts a été « très encourageant ». « Il y a du travail, mais tout le monde était enthousiaste, et on a pu apprendre beaucoup de choses sur la façon dont il faudra rédiger et présenter ce dossier. » Car l’Unesco a son langage, et ses critères très précis. « Tout le défi, c’est de les respecter, tout en ayant un dossier qui reflète l’identité culturelle et naturelle des Marquises », résume l’archéologue. L’audition devant le CNBFPM, en juin, n’est que la deuxième étape du processus au niveau national. « La plus grande marche, c’est celle qui suit : la constitution du plan de gestion », pointe Anatauarii. « Cela peut prendre beaucoup plus de temps que les deux premières. » ◆
Légendes
La baie de Hanavave.
Anatauarii Leal-Tamarii.
Tohua Hikokua – Vallée de Hatiheu.
La vallée de Hakaui.
Encadrés
Experts et spécialistes
Quatorze personnes ont suivi cette mission, dont, bien sûr, des agents de la DCP et de la Direction de l’environnement. On trouvait également dans la délégation la chargée de mission culturelle du haut-commissariat, Estelle Berruyer, le représentant de la communauté de communes des Marquises, Edgar Tetahiotupa, et des représentants du prestataire privé nommé par le gouvernement pour accompagner le dossier d’inscription. Le CNBFPM avait, lui, dépêché trois experts : Jean-Christophe Simon, architecte et urbaniste général de l’État et inspecteur général des monuments historiques, Thierry Lefebvre, chargé de programme « Aires protégées » au Comité français de l’UICN et Wolfgang Borst, chargé de mission « Territoires d’exception » au ministère de la Transition écologique et solidaire. Tous trois suivent la constitution du dossier Unesco des Marquises depuis plus de deux ans. S’ajoutaient, enfin, des personnalités invitées spécialement par le Pays : Pierre Ottino, archéologue et grand spécialiste du patrimoine marquisien, Christophe Sand, archéologue calédonien et président de la branche régionale d’Icomos (ONG liée à l’Unesco et spécialisée sur le patrimoine) ainsi que le botaniste Jean-François Butaud.
Légende
Échanges entre les experts sur le terrain.
Les sept composantes du dossier
– L’aire mixte marine côtière du groupe septentrional des îles inhabitées Eiao-Hatutu. Une aire qui inclut une superficie terrestre, Motu One.
– Sur l’île de Nuku Hiva, l’aire mixte marine côtière ouest et son prolongement terrestre jusqu’aux monts Tekapo – Oomu, les vallées de Hakaui et de Hatiheu.
– À Ua Pou, l’aire mixte terrestre formée par les pics et pitons, la vallée de Haka’ohoka et la baie de Hoho’i et son prolongement marin jusqu’à l’îlot inhabité de Motu Oa.
– À Hiva Oa, le site culturel de Upeke et la vallée de Taaoa.
– À Hiva Oa, le site culturel de Iipona et la vallée de Puamau.
– Sur Fatu Hiva, l’aire mixte terrestre de la baie de Hanavave jusqu’aux monts Touaouoho et Mounanui, les aiguilles de Oma, et son prolongement marin côtier.
– L’aire mixte terrestre et marine de Fatu Huku.