Hiro’a n°147 -L’œuvre du mois : À quoi ressemblerait l’habitat de demain ?
À quoi ressemblerait l’habitat de demain ?
Rencontre avec Matahi Coulon, professeur au CAPF de la classe Arts visuels, et Frédéric Cibard, chargé de la communication au CAPF.
Texte : Suliane Favennec – Photos : CAPF
Les élèves de la classe des arts visuels du Conservatoire artistique de Polynésie française ont imaginé en 3D l’habitat de demain. Un habitat sans industrie, vêtu de son plus simple appareil. Les jeunes apprentis ont fait preuve d’originalité !
« Une fusion géniale entre l’art et le numérique. » Frédéric Cibard, chargé de la communication au Conservatoire artistique de Polynésie française, ne tarit pas d’éloges sur le travail des élèves de la classe des arts visuels. Depuis la rentrée, ils travaillent sur une création bien particulière : un habitat minimal. Quand Frédéric a découvert leurs œuvres, il a été surpris par leur qualité et leur originalité. Il faut dire que les élèves sont bien entourés avec Matahi Coulon, leur enseignant. Formé au graphisme par le Centre des métiers d’art, l’artiste est connu au fenua pour ses fresques murales. Depuis sept ans, il transmet sa passion aux plus jeunes. « Ce sont des enfants qui ont soif d’apprendre et d’appliquer les choses. On dialogue avec des jeunes créateurs même si ce ne sont pas encore des artistes », confie Matahi, qui a décidé cette année d’attirer leur attention et de stimuler leur créativité sur l’architecture.
Une création libre
La consigne est simple : imaginer l’habitat de demain où l’industrie n’existerait plus. « C’est un peu une phase science-fiction dans laquelle les jeunes vivent. C’est donc la découverte de leur univers. » Les quatorze élèves âgés de 11 à 12 ans ont imaginé et créé un habitat à partir de matériaux simples : du carton épais, des baguettes en bois et de la colle synthétique. Le premier pour peindre et dessiner, les baguettes de bois pour donner une structure à l’habitat et la colle pour fixer le tout. « L’idée étant qu’ils acquièrent une belle connaissance de la matière, mais ensuite ils sont complètement libres. Ils peuvent d’ailleurs déchirer le carton pour camoufler l’objet. Il n’y a pas de limites si ce n’est de faire tenir l’objet », explique Matahi qui a choisi de former des binômes pour ce travail. Les anciens accompagnent les nouveaux élèves. « Il y a aussi une partie de conception graphique où ils imaginent si cela va pour des familles ou si c’est individuel. Cela permet de jouer sur les espaces. » Une fois ce travail manuel terminé, les élèves devaient inventer un paysage dans lequel intégrer leur habitat via Photoshop. Par exemple, un marécage, un désert, une forêt… « En travaillant avec ce logiciel, ils apprennent à travailler l’image et à la retoucher. Pour beaucoup d’enfants, le visuel est seulement une affaire de crayons alors que c’est plus que ça. Ils apprennent aussi le vocabulaire pour régler Photoshop. » Tout un apprentissage qui ne s’arrête pas là…
Des univers uniques et magiques
Matahi tient à emmener les élèves plus loin dans la création. Avec des histoires à imaginer, sur les problématiques actuelles, pour accompagner la matière : des planètes qui disparaissent suite au réchauffement climatique ou encore des habitations détruites après le passage de tempêtes ou d’inondations… Ces écrits sont ensuite intégrés dans le paysage imaginaire avec la maquette. « Toutes ces manipulations leur apprennent la patience. Car ce sont des jeunes qui veulent les choses très vite, de manière immédiate. Donc, les faire un petit peu attendre et patienter permet de leur donner envie de découvrir chaque petite étape. » En créant ces habitats, Matahi a appris aux jeunes élèves trois processus : la conception et la fabrication d’une maquette, le montage photo, et la mise en page d’un texte avec un équilibre à trouver. L’enseignant souhaiterait également collaborer avec un architecte local afin qu’il se prononce sur la vision de l’habitat minimal. « L’idée est qu’il parte avec les mêmes consignes. Cela permettrait de montrer aux jeunes la cabane où chacun rêve d’habiter mais avec une projection adulte sur un travail poussé. » En attendant, le résultat des jeunes apprentis est plus que probant, il est même surprenant : les enfants ont réussi à imaginer et créer des habitats avec peu de moyens. Des habitats qui se fondent parfaitement dans les paysages les plus divers. On découvre ainsi le royaume de Humanabeille, de Kalakin, de Katara, de Weird cav’s ou encore de Pierreeva et de Grenhoms… Autant d’univers pour nous transporter dans des mondes uniques. Ceux de leurs créateurs. ◆
Pratique
• Le département des arts visuels comporte trois cycles précédés d’un cycle d’éveil. Il existe également un enseignement pour les adultes « hors cursus » .
• Tél. : 40 501 414