N°134 – De la nacre à l’os et au bois
Service de l’artisanat traditionnel (Art) – Pu ohipa rima’i
Rencontre avec Layana Kiihapaa, créatrice de bijoux. Texte et photos : Élodie Largenton.
En revenant s’installer aux Marquises après avoir passé plusieurs années à Tahiti, Layana Kiihapaa a choisi de laisser peu à peu la nacre de côté pour créer des bijoux en os et en bois avec son compagnon, Clyde Tinirau. Ces créations seront visibles au 47e salon des Marquises, du 20 novembre au 2 décembre, au Parc expo de Mamao.
Il n’a suffi que de deux mois de vacances aux Marquises pour décider Clyde Tinirau à quitter Tahiti et à s’installer à Ua Pou, l’île dont sa compagne, Layana Kiihapaa, est originaire. « Il s’est dit qu’il allait plus créer là-bas », confie la jeune femme. Le couple est habitué à fabriquer ensemble des pièces en nacre. Layana, dont le père est sculpteur sur bois, a découvert le travail de gravure auprès de Clyde. « Après avoir été formé par Gee Mee Lee, Clyde a travaillé à l’atelier Itchner, et j’ai commencé à observer comment il faisait. Je lui ai demandé de m’apprendre quelques techniques simples et j’y ai pris goût petit à petit », raconte Layana.
En arrivant aux Marquises, il a fallu s’adapter. « On a eu des critiques sur notre choix de graver sur nacre, un matériau qui n’est pas marquisien. Alors on s’est mis à travailler l’os et on a vu qu’on pouvait se perfectionner sur cette nouvelle matière comme on l’avait fait sur la nacre », explique Layana.
Des créations uniques
Ce sont de nouvelles techniques qu’il faut découvrir, apprendre : « L’os est rond et non plat, donc la découpe est plus compliquée, surtout qu’on a acheté nos machines pour la nacre. La poussière de l’os est plus épaisse, ce qui fait qu’elle s’incruste plus dans la meule, d’autant qu’on travaille à sec pour ne pas gaspiller l’eau qui manque chez nous. » Mais ce ne sont pas les défis qui effraient ces jeunes talents. Clyde a même commencé à créer des parures en bois, en tutu. À Ua Pou, on lui a aussi donné des cornes de chèvre et de l’os d’espadon. « Il aime bien mettre de côté les matières et se laisser le temps de réfléchir avant de se décider à créer un bijou », précise Layana. Si c’est son compagnon qui dessine les parures, c’est elle qui prépare les pièces, les polit et en fait le montage.
Quelle que soit la matière, le couple veille à ce que la création soit « originale, unique », et aime peaufiner les détails comme l’attache et le perçage. Son stock de nacres s’épuise, seules de petites incrustations dans l’os et dans le bois subsisteront donc. Sans regret pour Layana, qui estime que cela leur a permis d’évoluer encore dans leur pratique.
Pour cette parure, le couple de graveurs a assemblé deux matières, l’os et la nacre. Le mélange n’est pas total, puisque la taille des pièces assemblées diffère selon la matière. On observe aussi une séparation entre les morceaux en nacre qui n’existe pas entre les morceaux en os. Tout a été pensé « pour créer un contraste, un décalage », explique Layana Kiihapaa. Son compagnon est spécialiste des motifs géométriques et pour cette pièce, il a choisi de graver la croix marquisienne et le triangle polynésien. « Clyde met en valeur les deux symboles, mais pour ce qui est de l’interprétation, il y a plusieurs possibilités, chacun est libre d’y voir ce qu’il veut », précise la créatrice.
47e salon des Marquises
Du 20 novembre au 2 décembre 2018, de 8h à 19h
Parc expo de Mamao
Organisé par la fédération Te tuhuka o te henua enana / Sarah Vaki Omoa Fatu Hiva 87 74 75 38, 40 92 80 06
+d’infos : www.artisanat.pf, 40 54 54 00, [email protected]