N°128 – Passer du monde associatif à la professionnalisation, c’est possible !
Service de l’artisanat traditionnel (Art) – Pu ohipa rima’i
Rencontre avec Sylvana Deane, artisane, fondatrice de Hanatea créations. Texte et photos : Élodie Largenton.
C’est l’histoire d’une reconversion réussie : après avoir travaillé pendant vingt ans dans le milieu médical, Sylvana Deane a trouvé le courage de se lancer et de faire de sa passion, la création de bijoux, un métier. Avec succès, puisque l’artisane de Moorea a remporté plusieurs prix et qu’elle tient une boutique au marché de Papeete depuis dix ans.
Sylvana Deane est connue pour ses bijoux, plusieurs fois primés au salon de la bijouterie d’art et au salon Made in fenua. La créatrice excelle aussi en peinture, en couture, ou encore en confection de tifaifai. « J’ai grandi à Moorea dans ce milieu de l’artisanat, ma grand-mère faisait des couronnes de fleurs, cousait des tifaifai, et ma mère a été parmi les premiers à réaliser des pareu », raconte Sylvana Deane. C’est à leurs côtés qu’elle a pris goût au travail manuel et depuis, elle n’a jamais arrêté de créer et d’explorer, en se spécialisant dans la confection de bijoux en nacre, en bois précieux et en coquillage. Pendant des années, elle a consacré tout son temps libre à la création, sans oser abandonner son métier dans le secteur médical.
C’est au sein du monde associatif que Sylvana Deane a commencé à vendre ses bijoux. La professionnalisation s’est faite par étapes : elle a pris une patente en 2003, mais « quand on est salarié depuis longtemps, c’est difficile de se lancer à son compte, surtout avec des enfants à charge », explique-t-elle. Alors Sylvana Deane a cumulé deux emplois pendant six ans, en ouvrant une boutique à Moorea et en continuant à travailler à mi-temps dans le médical. Encouragée par son mari et rassurée de voir que ses sautoirs asymétriques avaient beaucoup de succès, elle a finalement décidé de tenter l’aventure à 100%. Fin 2007, elle a ouvert sa boutique au marché de Papeete, Hanatea créations, du nom d’une plage de Ua Huka, l’île de son mari. Au début, la créatrice a géré seule la boutique ; « quand je quittais Moorea, il faisait nuit, et quand je rentrais, il faisait nuit aussi », raconte-t-elle. Puis, elle a été en mesure d’embaucher une employée et depuis trois ans, elle a une deuxième salariée. « Manager, ce n’est pas toujours facile », confie Sylvana Deane, mais elle semble avoir trouvé la bonne formule : chaque lundi, l’équipe fait un point sur la boutique, les demandes des clients, et les salariées suivent de temps à autre des formations vente.
Son seul regret, finalement, c’est d’avoir tardé à se lancer. Sylvana Deane a encore plein de projets pour l’avenir : elle rêve d’ouvrir une galerie, avec suffisamment de place pour exposer ses bijoux, ainsi que ses pareu, ses peintures, ses tifaifai et ses coussins. La créatrice aimerait aussi qu’un de ses enfants ou petits-enfants prenne la relève. Mais elle n’est pas pressée, elle compte bien travailler encore longtemps !
Les conseils de Sylvana Deane pour une professionnalisation réussie
– Investir : dès le début, elle a gardé une partie de ses revenus pour acheter du matériel.
– Ne pas vouloir tout gérer : après avoir passé des week-ends devant son ordinateur pour la partie administrative, elle a décidé de faire appel à un comptable.
– Être sérieux : être son propre patron permet de gérer son temps comme on l’entend, mais il ne faut pas délaisser le travail pour autant.
– Savoir gérer, ne pas confondre bénéfices et recettes.
– Étudier le marché quand on veut se lancer.
– Et surtout, aimer ce que l’on fait.
Où trouver de l’aide ?
Depuis l’année dernière, le Service de l’artisanat traditionnel propose une formation aux métiers de l’artisanat traditionnel. Elle est ouverte aux personnes âgées de 17 à 35 ans, issues de milieux associatifs et à ceux qui désirent exercer dans ce secteur d’activité.
+d’infos 40 54 54 00 – [email protected] – www.artisanat.pf