N°128 – La nature au cœur du 24èmeHeiva des écoles

 

Maison de la Culture (TFTN) – Te fare tauhiti nuiAffiche-HDE-2018-ok-01

Rencontre avec Véronique Clément, directrice de l’école Heiragi, Valérie Larsos, secrétaire de l’association Malama Honua Tahiti Iti, Hinatea Colombani, directrice de l’école Matehaunui, et Vaiana Giraud, responsable de la production et de la communication à la Maison de la Culture. Texte : Élodie Largenton.

 

Chaque année depuis 24 ans, les écoles de danse et d’instruments traditionnels ont l’honneur de lancer les festivités du Heiva. Pour les élèves et les professeurs, c’est l’aboutissement d’un an de travail. Lors de cette 24ème édition, qui se déroulera du 30 mai au 10 juin, plusieurs écoles vont mettre en avant un thème qui leur est cher : la préservation de la nature.

 

C’est une tradition, ce sont les écoles de danse et de musique qui donnent le coup d’envoi du Heiva. Toutes les écoles se retrouvent sur la même scène, « que ce soit de petites écoles, des associations ou des écoles dont les responsables ont aussi de grands groupes, comme Hei Tahiti et Tamariki Poerani », souligne Vaiana Giraud, responsable de la production et de la communication à la Maison de la Culture. Le Heiva des écoles, c’est une fête qui permet de valoriser les enfants et de mettre en avant le travail des écoles. Pour Véronique Clément, directrice de l’école Heiragi, « c’est important de lancer les festivités, parce qu’on va à la source, ce sont ces élèves qui seront à notre place demain ». Les écoles qui participent enseignent la danse, mais aussi les percussions et le ‘ukulele. « La musique, le chant, ça fait partie de la danse, il faut que les enfants comprennent ce que les gestes veulent dire. ‘Aparima veut dire danse avec les mains, les élèves doivent aussi apprendre la langue », fait valoir Véronique Clément. L’association Malama Honua Tahiti Iti, de Taravao, partage cette vision des choses. Depuis 2014, Valérie et Jan Larsos, enseignants en classe de CM2 à l’école OhiTei-Tei, ont mis en place un partenariat avec l’équipe hawaiienne de la pirogue Hokule’a. Dans le cadre de ce projet éducatif et culturel, les enfants se réunissent chaque semaine pour apprendre les percussions, le chant, la danse. « On veut asseoir leur identité culturelle, qu’ils sachent d’où ils viennent », explique Valérie Larsos, la secrétaire de l’association. Le spectacle du Heiva des écoles fait partie du processus, « il apporte la confiance en soi et en sa culture », affirmeHinatea Colombani, fondatrice et directrice de l’école Matehaunui.

« Protège ta terre »

Ces trois écoles ont en commun de mettre l’accent, cette année, sur la nature et la nécessité de la préserver. « Malama Honua veut dire ‘protège ta terre’ en hawaiien », précise Valérie Larsos. L’association a commencé par faire travailler les enfants sur la navigation ancestrale, avec des séjours à Hawaii et un stage à Tahiti auprès de Faafaite. Mais l’objectif de Valérie et Jan Larsos est plus large : « Sensibiliser les enfants à la protection de notre fenua et les remettre dans notre culture ». Nature et culture sont donc liés, les cours de danse et de percussions complètent le travail effectué avec des associations comme Haururu, qui rassemble des défenseurs de la vallée de la Papeno’o. En février dernier, les enfants de Malama Honua Tahiti Iti, âgés de 9 à 14 ans, ont fait un séjour d’une semaine à Rangiroa, « au secteur, sur un motu, dans un milieu qui n’a pas été trop touché par l’homme », raconte Valérie Larsos. De son côté, l’école Heiragi a choisi pour thème de son spectacle du Heiva des écoles « la nature, ce que la terre nous donne », indique Véronique Clément.

Quant à l’école Matehaunui de Papara, elle va proposer des costumes originaux. « Opération zéro coquillage pour protéger notre fenua et notre moana », annonce la directrice de l’école. Tout est parti d’une réunion avec les adolescents de l’école, en août dernier, raconte Hinatea Colombani, également à la tête du centre culturel ‘Arioi. « La danse dit les maux de la société, et quels sont ces maux aujourd’hui ? Les déchets, la pollution, et la violence », d’après les jeunes. Durant une sortie en mer, ils ont vu un grand-père et son mo’otua laisser deux briques de jus sur la plage après s’être baignés. Une partie du spectacle du Heiva retracera ce moment.« On est fiu de voir notre Terre saccagée ! Et par qui ? Par nous-mêmes. Il est temps de réagir », estime Hinatea Colombani. L’école a donc décidé de porter son message également à travers ses costumes. Ils sont confectionnés principalement à base de capsules, collectées via Facebook et un distributeur de café en capsule. Certaines sont nettoyées et triées par les élèves sur leur temps d’activité au centre. « Ce projet nous a permis de les sensibiliser à l’environnement », rapporte la directrice de l’école Matehaunui. Il y aura bien, tout de même, des coquillages sur scène, mais ils proviendront des colliers achetés l’année dernière. « Notre démarche est la suivante : ne pas puiser dans l’océan les coquillages qui ne vont être portés qu’un instant », explique Hinatea Colombani. Les élèves préparent aussi leur tissu pour le spectacle : ils décorent le faraoti avec une technique hawaienne à base de tampons en bambou pour la décoration du tapa. Pour Hinatea Colombani, le rôle de l’école n’est pas seulement d’enseigner la technique des disciplines traditionnelles aux enfants, mais de dispenser un état d’esprit.

À l’école Heiragi, ce sont en général les parents et les professeurs qui confectionnent les costumes. Les enfants n’ont pas le temps, il vaut mieux qu’ils se concentrent d’abord sur les pas de danse, estimeVéronique Clément. Les jeunes filles de l’école Heiragi découvrent souvent leur costume peu de temps avant leur passage sur scène. « Elles sont éblouies par tout ce qu’elles voient, elles sont tellement curieuses ! Avant le spectacle, elles peuvent être stressées, mais quand elles sortent de scène, elles nous demandent ‘c’est déjà fini ?’ Elles continuent à danser encore longtemps après », raconte Véronique Clément. Cette passion pour les arts traditionnels sera donc à partager du 30 mai au 10 juin, au Grand théâtre.

 

 

Déjà la 24ème édition !

Le Heiva des écoles a vite pris une place importante dans le calendrier culturel. Créé à l’occasion des 2èmes Jeux de la francophonie, en 1994, il rassemble aujourd’hui une quarantaine d’écoles de danse, de percussions et de ‘ukulele. Ce sont donc des milliers d’élèves qui se produisent chaque année à Papeete, hier à To’ata et désormais au Grand théâtre, « une scène plus adaptée à l’événement, plus chaleureuse et moins intimidante pour les enfants », estime Vaiana Giraud. Cela présente aussi l’intérêt d’être à l’abri des intempéries et permet des jeux de lumière plus poussés.

Les élèvesdanseurs et musiciens incarnent la vitalité de la culture polynésienne et la relève de demain. Les plus jeunes ont tout juste trois ans ! Certains viennent de la Presqu’île de Tahiti, quelques uns font même le déplacement des îles. Contrairement au Heiva i Tahiti, ce n’est pas un concours, il n’y a pas de règlement, pas de note, il s’agit seulement de célébrer la culture polynésienne et de valoriser les plus jeunes. Avec succès : l’engouement pour le Heiva des écoles ne se dément pas depuis 24 ans.

 

 

Participer au Heiva, toute une organisation pour les écoles des îles !

Cette année, deux écoles de Moorea, une école de Rangiroa et une école de Bora Bora participeront au Heiva. Pour ces établissements, il faut non seulement préparer des chorégraphies, un thème et des costumes, mais aussi le séjour à Tahiti. Liana Hutia, de l’école Hivaiti, de Bora Bora, participe pour la deuxième fois d’affilée à ce grand rendez-vous à la Maison de la culture. Le compte à rebours commence dès le mois d’août, explique-t-elle : « Dès que les cours reprennent, on commence à vendre des plats. On donne aussi des petits spectacles dans les hôtels et on organise un gala. » Cela permet d’assurer l’hébergement des 52 élèves qui feront le déplacement, en ce mois de mai. Avec leurs parents, ils seront logés dans un fare amuiraa à Punaauia pendant quatre jours. L’école fournir aussi les costumes, principalement en nacre cette année. En revanche, les participants doivent payer eux-mêmes leur billet d’avion pour Tahiti. Tous ne peuvent donc pas partir, environ la moitié des élèves a dû y renoncer.

Mais pour Liana Hutia, les sacrifices en valent la peine, tous les élèves et les professeurs étaient ravis de leur première participation, en 2017. Cela permet aussi de motiver les enfants tout au long de l’année.

 

 

« Sans musique, pas de Heiva »

Pour Valentin Temaiana, directeur de l’école de percussions Arata’i, à Arue, la musique, c’est « un héritage culturel qu’il faut transmettre ». Et c’est ce qu’il fait depuis 17 ans au sein de son école réputée. Ses élèves ont l’occasion de montrer chaque année, lors du Heiva des écoles, ce qu’ils ont acquis au fil des cours ; l’école Arata’i n’a manqué aucune édition depuis sa création !

Papi Teupoo, comme on l’appelle, forme généralement deux groupes pour le passage sur scène : les débutants et les confirmés. Dans les deux cas, les élèves jouent principalement des musiques d’antan, « les bases ». Comme l’explique sa fille Maeva, pour papi Teupoo, « il est important de transmettre la base de la musique traditionnelle, tu ne peux pas créer sans socle, et tous les élèves en sont conscients ». Il faut aussi avoir l’oreille musicale ; cela peut être un don, mais on doit parfois « apprendre à l’avoir », souligne Maeva. Elle raconte que, parfois, les élèves confirmés font des petites improvisations sur la scène du Heiva des écoles, comme pour prouver qu’avec « l’oreille musicale et les bases acquises, on peut faire beaucoup de choses ».

Ce passage sur scène est un grand moment pour les enfants et leurs parents, mais aussi pour papi Teupoo : « C’est important de prouver que la musique a une place justifiée au sein du Heiva des écoles. Sans musique, sans to’ere, pas de Heiva ! » Certains enfants font d’ailleurs le choix d’apprendre les bases de la musique traditionnelle en même temps que la danse. « Ils comprennent que c’est important d’avoir l’oreille musicale quand on veut danser », souligne Maeva.

Ces élèves sont fidèles à papi Teupoo jusqu’au moment d’intégrer un groupe professionnel. Ils brillent alors au Heiva et au Hura Tapairu à la manière de son « premier élève », son fils Poehei Temaiana, qui fait partie du jury du Heiva 2018 pour la partie musicale.

 

 

 

Pratique

Grand théâtre de la Maison de la culture

Tarif enfant – de 12 ans par séance : 500 Fcfp

Tarif adulte par séance : 1 500 Fcfp

Tarif adulte pour deux séances le même soir : 2 000 Fcfp

Tarif PMR + accompagnateur : 2 000 Fcfp

BB – 2 ans gratuit sur présentation billet BB

Billetterie en ligne : majoration de 100 CFP sur chaque billet (frais bancaires)

Vente des billets sur place et en ligne à partir du vendredi 27 avril.

Sur place 1 heure avant les soirées

Renseignements 40 544 544/www.maisondelaculture.pf

 

 

Programme

Mercredi 30 mai

1ère séance – 18h : Tupuna ‘ukulele ; Tahiti Ora

2ème séance – 20h : Nivai ; Nonahere

Jeudi 31 mai

1ère séance – 18h : Korihaga Manea danse ‘ukulele ; Ori Hei

2ème séance – 20h : Manahere ; Vaheana

Vendredi 1er juin

1ère séance – 18h : MalamaHonua Tahiti Iti ; Hanihei

2ème séance – 20h : Matehaunui Centre Culturel et Artistique Arioi ; Matehaunui

Samedi 2 juin

1ère séance – 17h : Turereura (Rangiroa) ; Vahinerii

2ème séance – 19h : Aratoa enfants ; Aratoa adultes

Dimanche 3 juin

1ère séance – 17h : Toa no Tipaepo ; Monoihere

2ème séance – 19h : Heiragi ; Hei Ori

Mercredi 6 juin

1ère séance – 18h : Ecole de percussions Arata’i ; Manohiva

2ème séance – 19h35 : TamarikiPoerani enfants ; TamarikiPoerani adultes

Jeudi 7 juin

1ère séance – 18h : Hana ; Tamari’iPina’i

2ème séance – 20h : Teikohai ; Ori Tuahiti

Vendredi 8 juin

1ère séance – 18h : Hinemanea (Moorea) ; Ori Atea

2ème séance – 20h : Ecole de danse Temanutiaitau ; Ecole de danse Tauariki

Samedi 9 juin

1ère séance – 17h: Tetuahuraiti (Moorea); Heihere (Moorea)

2ème séance – 19h : Hivaiti ; Rainearii

Dimanche 10 juin

1ère séance – 17h : Ecole de ‘ori tahiti Patricia Tokoragi ; Centre de formation Hei Tahiti

2ème séance – 19h : Tamarii Poerava Faa’a et Taravao

 

 

Vous aimerez aussi...