N°125 – Un documentaire réussi, c’est comme un voyage réussi, il doit nous transporter
Maison de la Culture (TFTN) – Te Fare Tauhiti Nui
Eric Lavaine, président du jury du FIFO 2018.
Pour cette 15ième édition, le FIFO a demandé au réalisateur Eric Lavaine de présider ce festival pas comme les autres. Habitué aux comédies, cette personnalité du cinéma français effectuera son premier séjour en Polynésie française, et compte bien porter un regard nouveau et bienveillant sur l’Océanie.
Tahiti est une première pour vous, qu’est-ce qui vous a convaincu de participer au FIFO ?
C’est la première fois que je pars si loin, à l’autre bout du monde. Mais j’imagine que pour tous les Tahitiens, c’est moi qui habite à l’autre bout du monde… J’ai surtout eu la chance de rencontrer à Paris Wallès Kotra, directeur du réseau Outre-mer et France Ô. Il m’a parlé avec sa passion communicative de l’Océanie et du FIFO. Du coup, je suis très heureux de participer à l’édition 2018 !
Vous êtes plutôt habitué à réaliser des séries TV et des comédies, quelle est votre approche sur le documentaire ?
Je regarde plus de documentaires que de films de fictions. Et ce sont souvent des documentaires et des reportages qui me donnent l’idée de sujets de films ou de lieux où j’aimerais tourner. Ce qui est fantastique avec le documentaire, c’est que tout en restant assis dans son canapé chez soi on peut découvrir le monde entier. Louis XIV ou Napoléon, aussi puissants fussent-ils, n’ont pas vu un dixième de ce que nous découvrons grâce aux documentaires !
L’humour est-il parfois le meilleur moyen d’interroger et de faire passer les messages au public ?
L’humour est un fantastique moyen de communiquer. Je trouve que plus les sujets sont graves, plus l’humour nous est utile pour faire « passer la pilule ». Mes derniers films sont perçus comme des comédies mais les histoires racontées sont en fait des drames. Dans Barbecue je traitais de l’usure de l’amitié, dans Retour chez ma mère des jalousies familiales, et dans mon prochain film Chamboultout, je m’intéresse au handicap.
Quel regard portez-vous sur l’Océanie et sur son cinéma ?
Je suis, hélas, assez représentatif des Français de Métropole qui ne connaissent de l’Océanie que des clichés éculés : l’Australie se résumerait aux kangourous et la Polynésie à des plages paradisiaques peuplées de gens sympathiques qui portent des colliers de fleurs. Heureusement, cela commence à bouger. J’ai la chance de participer au FIFO, je compte bien profiter du festival et de mon séjour pour m’ouvrir plus sur l’Océanie et dépasser cette vision simpliste.
Au FIFO, vous ne visionnerez que des documentaires. Selon vous, qu’est-ce qu’un « beau » documentaire ou un documentaire « réussi » ?
Un documentaire réussi, c’est comme un voyage réussi. Il doit nous transporter quel que soit son sujet. Il doit y avoir une dramaturgie et des vrais personnages. C’est en cela que le documentaire pourrait rejoindre le cinéma comme faisant partie du 7ième art. Je donnerais même à l’art du documentaire le titre de 7ième art et demi. En effet un documentaire, à l’instar d’un film, raconte, certes une histoire, mais c’est une histoire vraie !
Est-ce qu’un documentaire vous a récemment touché ?
Il y en a beaucoup qui me touchent, que je vois et revois régulièrement. La multiplication de chaines dédiées aux documentaires est une bénédiction. Si je devais faire un TOP 5 des documentaires qui m’ont le plus marqués : Le peuple Migrateur de Jacques Perrin et La Planète Bleue de la BBC pour la beauté des images et les messages qu’ils nous transmettent sur la nécessité de protéger la terre, Sugar Man qui raconte l’histoire incroyable du chanteur Sixto Rodriguez, Le cauchemar de Darwin qui arrive à en se servant d’un poisson, la perche du Nil, a exposer les dangers de la mondialisation, Lost in la Mancha qui est le making off hallucinant de Dom Quichotte, film qui ne s’est jamais fait et Les yeux dans les Bleus sur l’épopée de la coupe du monde 98, à revoir en attendant la victoire française au mondial 2018 ! En recomptant je remarque que mon TOP 5 est un TOP 6 …
Vous êtes vous déjà essayé au documentaire ?
J’adorerais mais je ne sais pas si j’en ai la patience et surtout le talent journalistique. Le seul point sur lequel je pourrais avoir quelques compétences c’est sur le montage et la création d’une tension dramatique. Je remarque d’ailleurs que depuis quelques années les documentaires ne se contentent pas d’enfiler les images et les informations. Ils ont généralement un vrai pitch et une véritable dramaturgie.
Quel président de festival voulez-vous être ?
Un président qui prend le temps de la rencontre, de la découverte et de l’échange.
Qu’est-ce qui vous a le plus appris au cours de votre carrière ?
La vraie vie.
Un petit message pour nos lecteurs ?
Amusons-nous !