N°122 – « Le Hura Tapairu est une très belle vitrine pour la danse tahitienne »
Maison de la Culture (TFTN) – Te Fare Tauhiti Nui
Rencontre avec Fabien Dinard, directeur du Conservatoire et président du jury 2017 du Hura Tapairu. Texte : ASF – Photo CAPF
L’homme est rompu à l’exercice et ne s’en lasse pas. Pour la troisième fois, Fabien Dinard, le directeur du conservatoire, a été désigné comme président du Hura Tapairu. Une compétition qui depuis 13 ans ne cesse de prendre de l’ampleur. Cette année, avant même la date de clôture, les inscriptions ont été arrêtées avec quarante-trois groupes en lice.
Vous êtes président pour la troisième fois du Hura Tapairu, depuis quand êtes-vous membre du jury ?
Si Vanina (Ehu) et Matani (Kainuku) sont dans le jury depuis le début de l’aventure, Moana’ura (Tehei’ura) et moi-même avons rejoint l’équipe la deuxième année. La première année du Hura Tapairu, je participais avec ma troupe Te Maeva et nous avions raflé tous les prix. C’est ensuite qu’on m’a demandé de rejoindre le jury. Cela fait donc douze ans que je note les candidats de ce concours. Cette année, Poerava Taea et Teraurii Piritua seront également avec nous.
Il n’y a pas de lassitude ?
Non pas du tout, même si certaines années, je me disais que ce serait la dernière. Et puis l’année qui suit, je me replonge dedans, car c’est aussi très enrichissant pour nous, les chorégraphes. Chaque année, je suis excité de découvrir de nouveaux chorégraphes, les groupes se surpassent.
Est-ce que le niveau a évolué en 13 ans ?
Aujourd’hui, on peut dire que ceux qui arrivent en finale ont été vraiment bons dans tous les domaines : musique, chorégraphie, costumes… C’est de plus en plus dur de les départager.
Qu’est-ce qui vous touche ?
Je suis souvent touché par des groupes que l’on ne connaît pas du tout. Ce sont généralement des jeunes qui donnent le meilleur d’eux-mêmes. Certains sont des lycéens, ils montent des groupes entre copains. J’ai vu cela avec des jeunes du lycée Samuel Raapoto et de l’internat de Taravao. Pour moi c’est beaucoup d’émotion. Pour certains ce sont presque des groupes paroissiaux, ils viennent du district avec le meilleur d’eux-mêmes. Ils ne font pas le poids contre les groupes plus expérimentés, mais ils viennent avec leur authenticité, leur cachet. Cela me touche, il n’y pas de chichi, il y a plus de vrai.
Vous fonctionnez donc plus au coup de cœur ?
Pour les soirées de sélection, il y a des fiches de notation à respecter. Les critères sont précis, mais il reste 10 % de la note qui est attribuée selon la sensibilité du jury. Ce n’est pas négligeable. Les soirs de finale, la notation est plus intuitive, nous regardons l’évolution du groupe d’une soirée à l’autre.
Quels conseils donnez-vous à ceux qui arrivent en finale ?
Souvent les groupes apportent des modifications entre la première prestation et celle de la finale. Ce sont souvent des modifications qui desservent la chorégraphie. Je leur conseillerais de limiter les changements !
Qu’est ce qui fait le succès du Hura Tapairu ?
C’est un événement populaire tant pour les danseurs que pour le public. C’est une occasion unique pour les petites formations de se présenter sur une scène. Il n’y a pas les contraintes de costumes, les besoins financiers sont moindres. Et puis cela reste un tremplin vers le Heiva pour les jeunes chorégraphes.
Faut-il garder cette priorité aux petites formations ?
La question est de savoir si on ouvre encore aux grands groupes qui sont toujours plus nombreux à venir. Cette année, les inscriptions ont été arrêtées un mois plus tôt que prévu, car nous avons atteint 43 groupes au lieu des 40 prévus au maximum.
Il y a aussi une dimension internationale du Hura Tapairu ?
Le Hura Tapairu est une très belle vitrine pour la danse tahitienne. Beaucoup d’étrangers font le déplacement pour voir le Hura Tapairu. C’est un événement connu mondialement. Aujourd’hui, on a créé le Hura Tapairu International, pour permettre aux groupes étrangers de danser à Tahiti. L’idée c’est que la Polynésie reste la source, la référence en matière de danse. C’est ici qu’il faut apprendre, qu’il faut concourir.
Cela sous-entend de partager notre savoir, tout le monde n’est pas d’accord avec cette idée…
Notre culture doit être partagée, cela veut dire aussi qu’il faut que nous parlions la même langue entre nous. Nous devons classer les pas de danse pour les protéger et faire en sorte que la Polynésie soit le lieu du savoir, la source de la danse.