N°117 – Une couronne en roseaux des montagnes

 

Service de l’artisanat traditionnel (ART)– Pu Ohipa Rima’iOeuvre du mois © Lucie Rabreaud 02

 

Rencontre avec Soraya Faraire, artisane de Rapa

 

Le roseau des montagnes est la matière reine des artisans de Rapa. Soraya Faraire propose des couronnes et des chapeaux fabriqués dans cette matière. Ses créations ont la finesse de la dentelle. Texte : Lucie Rabréaud.

 

Soraya Faraire est contente. Quand elle contemple sa couronne faite de feuilles séchées de pine*, de roseaux de montagne et de raphia, elle se souvient des heures de travail qu’il lui a fallu pour arriver à ce résultat. Cette artisane est née à Rapa, elle y a appris à tresser le roseau des montagnes avec sa belle-mère. Depuis une dizaine d’années, elle s’est mise à faire ses propres couronnes, « fiu » d’aller acheter cet ornement de tête au marché. Aujourd’hui, elle vit à Tahiti mais dès qu’elle le peut, elle descend à Rapa et fait le plein de roseaux des montagnes. C’est sur cette île des Australes que le roseau est devenu une matière première importante pour les artisans. Si on trouve cette plante à Tahiti aussi, elle reste moins accessible qu’à Rapa. Il a fallu deux jours à Soraya pour aller chercher les roseaux nécessaires à sa couronne.

 

Une préparation minutieuse

 

Trempées durant six heures dans de l’eau bouillante mélangée avec du citron, les tiges sont ensuite mises à sécher afin qu’elles perdent toute leur eau. Une fois le roseau bien sec, Soraya coupe chaque tige en deux à l’aide d’un couteau, puis, posée sur un rondin de bois, elle l’aplatit et enlève de l’épaisseur. Plusieurs brins naissent ainsi d’une seule tige. C’est avec ces délicats brins couleur sable qu’elle confectionne des fleurs ou des bouquets tressés pour les accrocher avec du raphia sur la couronne. Entre chaque décoration de roseau des montagnes, elle a glissé des feuilles séchées de pine. La préparation de cette feuille demande aussi beaucoup de temps. Elle est cueillie et mise à tremper dans de l’eau pendant une à deux semaines et ensuite séchée après avoir été légèrement chlorée pour la faire blanchir. Ces rosaces couleur crème s’accordent à merveille avec le roseau des montagnes. Une journée entière a ensuite été nécessaire pour faire la couronne.

 

Innover

 

Soraya avoue sa préférence pour le roseau des montagnes. Elle connaît aussi le tressage avec le pandanus mais trouve l’exercice plus délicat et fin avec le roseau. Sur ses chapeaux faits en roseaux des montagnes, les tressages ressemblent à de la dentelle. Pour le Salon, organisé par la Fédération Faaa te rima ve’a ve’a, qui s’est tenu à l’assemblée de la Polynésie française la première quinzaine de mai, elle voulait présenter des nouveautés. Elle a donc fait plusieurs tests, tenté des mariages de matières plus ou moins heureux et a fini par confectionner cette belle couronne « réservée aux grandes occasions ou pour le dimanche », précise-t-elle. En quelques jours, une cinquantaine de couronnes qu’elle avait fabriquées ont été vendues. « Je cherche toujours à innover, à proposer des choses nouvelles ou à faire d’une autre façon », explique Soraya qui puise son inspiration dans la nature ou au fond d’elle-même. Elle garde un souvenir de toutes ses créations dans un album photo réunissant les clichés pris par son fils et sa petite-fille.

 

*pine : de son nom botanique xylosma suaveolens. Appartenant à la famille des Flacourtiacés, cet arbre est une espèce endémique de Polynésie orientale et indigène en Polynésie française.

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