N°117 – Le Gala du Conservatoire : pour finir l’année en beauté !
Conservatoire Artistique de Polynésie française (CAPF) – Te Fare Upa Rau
Rencontre avec Frédéric Cibard, chargé de la communication au Conservatoire Artistique de Polynésie française
C’est toujours un moment très attendu. Le Gala du Conservatoire clôt une année entière de travail mais amorce aussi les grandes fêtes du Heiva. Revue détaillée de cette grande fête qui réunira 800 élèves des arts traditionnels. Texte : Lucie Rabréaud
Les danseuses et danseurs sont sagement assis sur la place To’ata, attendant les consignes. Quelques parents sont restés dans les gradins à veiller sur leurs enfants mais aussi grapiller quelques moments en exclusivité du Gala prévu le samedi 10 juin. L’orchestre donne le rythme, c’est parti ! Ce moment particulier où tous sont réunis sera le tableau d’ouverture du Gala. Ce sont les salutations au public, appelées en tahitien aroha. Cette scène a souvent lieu à la fin d’un spectacle mais pour que les plus jeunes soient aussi de la partie, elle sera placée au début. L’occasion de voir cette belle réunion des élèves âgés de 4 à 77 ans sur une même scène. « Le Gala est le moment central de l’année pour le Conservatoire. C’est à la fois l’aboutissement d’une année d’enseignement, la réunion de toutes les classes et de tous les cycles, c’est le partage d’un thème, et c’est aussi l’occasion d’aller plus loin en matière chorégraphique avec les élèves de haut niveau. Ils vont aussi présenter un haka », explique Frédéric Cibard, chargé de la communication de l’établissement.
La transmission au cœur du Gala
Cette année, le spectacle a été bâti autour du thème de la transmission. Un thème qui parle des missions du Conservatoire : pourquoi l’école existe, ce qui y est enseigné et pourquoi. « On s’approche des 40 ans de l’établissement et nous avons décidé que le moment était peut-être venu de faire un bilan, dire ce que nous faisons, comment et avec qui. C’était un peu rendre hommage à cette école et rappeler à chacun nos missions d’enseignement ». Danse, percussions, chants et orero, tous les arts traditionnels enseignés au Conservatoire vont donc célébrer l’établissement et le raconter. Après le tableau initial, 14 autres tableaux vont s’enchainer, montrant la progression de chaque cycle. Des plus petits aux plus grands. « Ce spectacle nécessite une discipline incroyable, estime Frédéric Cibard, les yeux rivés sur les élèves qui participent à la répétition générale. Ils ont tous les mains sur les hanches, quand on sort, on ne sort pas n’importe comment. C’est extrêmement précis. C’est un travail de longue haleine, transmis de génération en génération. » C’est aussi l’histoire de la transmission de l’enseignement avec les jeunes professeurs, placés devant leurs élèves, qui, après avoir été parmi les danseurs, sont aujourd’hui devant eux pour montrer encore une fois les gestes et les pas.
Exigence et excellence
Le Gala du Conservatoire est une grande célébration des arts vivants et la fierté de porter cet enseignement. « Nous sommes fiers de présenter une école vivante. On remplit notre rôle d’école et de formation. On n’oublie pas d’expliquer à nos élèves qu’une fois qu’ils sortent diplômés du Conservatoire, tout commence pour eux. Notre fierté est de les voir arriver tout petit, vivre leurs premières émotions, les voir évoluer, se développer, les voir grandir puis les voir s’envoler. Il y a un lien qui reste entre eux, le Conservatoire, les musiciens, et l’orchestre. Et les professeurs resteront des mamans et des papas. » Cette grande école montre aussi l’excellence et l’exigence de son enseignement avec la précision des placements, des chants, des orero déclamés. Quand les percussions commencent à résonner, les élèves se laissent porter par le rythme et savent le décrypter.
Une explosion de joie
Cette fête est très émouvante car c’est la fin d’une année de travail. Tous les élèves sont rassemblés sur To’ata pour une grande soirée. « On a parfois l’impression qu’ils font partie d’un seul être. C’est une même famille, un même souffle, le même mouvement. C’est une démonstration d’unicité merveilleuse de cette culture. Lors de la nuit de Gala on laisse exploser notre joie », explique Frédéric Cibard. Plusieurs moments exceptionnels sont prévus pendant l’événement : une déclamation de John Mairai, professeur de orero et de culture générale, qui va ouvrir une fenêtre historique et raconter l’histoire du grand ancêtre de la dynastie des Pomare. Mama Iopa, professeur de hīmene, va diriger le plus grand chœur de hīmene du fenua, composé de 200 à 300 personnes, réunissant enfants et adultes. « Pendant l’apprentissage du hīmene au Conservatoire, je leur montre comment se placer et le départ du hīmene. Cela va être un grand moment du Gala », précise-t-elle avec le sourire. C’est elle qui écrit les paroles des chants du Gala qui racontent l’apprentissage, le sens des chants, des pas, des gestes…
Une relève assurée
Cette grande fête des arts traditionnels montre que le savoir transmis n’est pas seulement culturel, il est global. Les élèves font l’apprentissage de la vie collective, de la culture, du spectacle, de l’excellence. « Dans quelques années, prédit Frédéric Cibard, les meilleurs éléments danseront dans tous les groupes, amateurs et professionnels. Ils prendront la relève pour faire vivre cette belle culture. » Comme Papeiha, élève du cursus classique en saxophone et du cursus traditionnel en danse. Déjà 12 années qu’il est élève au Conservatoire. « J’aime bien le Gala car on se retrouve tous sur To’ata avec le public qui vient nous regarder, nous encourager et voir notre travail de toute l’année. C’est important. On essaye de donner le meilleur de nous-mêmes et de bien interpréter les pas, les chants. La danse est un moyen de pouvoir transmettre ce qu’on ressent et ce qu’on pense. C’est notre culture. Ça fait chaud au cœur quand on est tous ensemble. L’important pour moi est de pratiquer la danse, perpétuer ma culture et connaître la signification des pas », explique le jeune homme. Le Gala est un moment de nostalgie car il symbolise la fin de l’année, mais il est aussi une jolie entrée en matière pour les fêtes du Heiva qui suivent quelques semaines plus tard.
Paroles aux professeurs
Vaehakaiki dite Moon, professeur de ‘ori tahiti
« Notre objectif, cette année, est de présenter l’évolution des élèves : des bas âges jusqu’aux adultes. On commence par la base et on montre toute la progression de l’apprentissage de la danse. Le challenge est de réunir toutes les classes sur un seul tableau et de réussir à mettre tous nos élèves sur la scène. Le Gala est un moment important pour le Conservatoire qui se déplace en masse mais aussi pour les élèves car on vient sur la scène de To’ata et ce n’est pas n’importe quelle scène. C’est ici que les événements du Heiva se déroulent. »
Mama Iopa, professeur de hīmene
« Dans le tārava, les chansons racontent ce qu’est le Fare Upa Rau, le Conservatoire. Cela raconte l’initiation des bébés à la danse et à la voix, puis l’évolution en deuxième, troisième, quatrième année, etc. Au fur et à mesure que les âges montent, on avance dans la transmission. C’est ce travail et cette progression qui sont racontés dans les chansons ainsi que le sens des voix : tārava, fa’a’ara’ara, ute, hīmene ruau, et les différentes mélodies… On parle de la transmission et du sens des chansons et des pas, cela raconte l’apprentissage et ce que l’on apprend. C’est important d’expliquer tout cela pour que les enfants sachent que ce qu’ils chantent, ce n’est pas n’importe quoi. Quand ils iront danser ils sauront que tel pas, tel mouvement, c’est ce qu’ils viennent de chanter. Apprendre la signification des chants et des pas rentrent dans l’apprentissage. »
Mike Teissier, professeur de hīmene
« Je vais diriger le groupe des adultes au Tārava Tahiti, cela fait une soixantaine de personnes. Le Gala, c’est le résultat du travail fourni pendant le dernier semestre, depuis janvier. Lors de nos répétitions, tout le monde est sérieux donc ils seront à la hauteur ! Le Gala est aussi un peu un challenge car c’est à ce moment-là que nous allons être jugés sur notre travail. C’est l’opportunité aussi pour les élèves de venir chanter sur To’ata. C’est très enrichissant. »
Toanui, professeur de danse
« Le Gala signifie, pour moi, la fin des cours et la possibilité pour mes élèves de montrer ce qu’ils sont capables de faire et ce qu’ils ont appris tout au long de l’année. A travers eux, les spectateurs voient aussi le travail du professeur. Les plus petits ne sont pas tellement impressionnés par To’ata. Au contraire, ils n’attendent que ça ! Chez les grands, c’est l’inverse : ils sont stressés, ils ont le trac. Cela fait six mois que l’on prépare le Gala. A travers l’apprentissage de la chorégraphie pour le spectacle, ils apprennent les bases. On les met en condition. Au lieu d’un apprentissage basique, ils apprennent pour le Gala. C’est plus motivant. Cette année, il y a un bon niveau. Je suis confiant. Je pense que le Gala va être magnifique et que les élèves vont assurer ! »
PRATIQUE :
Samedi 10 juin – à 18h
Place To’ata
Les billets de l’événement sont en vente aux guichets de la Maison de la Culture aux tarifs habituels (tribune centrale : 1 500 Fcfp, tribunes latérales : 1 000 Fcfp, 500 Fcfp : enfants, gratuit pour les moins de 2 ans) et en ligne sur le site de l’établissement (www.heiva.org), qui coréalise le spectacle avec le Conservatoire.
+ d’infos : CAPF : 40.50.14.18 et TFTN : 40.544.544.