N°115 – L’art au service des matières
Service de l’Artisanat Traditionnel – Pu ‘ohipa rima’i
Rencontre avec Philippe Petis, artisan graveur.
Texte et photos : SF.
Philippe Petis est artisan depuis plus de 25 ans. Sa spécialité : mélanger les matières, et créer ainsi des bijoux uniques. Rencontre.
Comme beaucoup d’artisan, Philippe Petis est un autodidacte qui a commencé dans le milieu à force d’observer son entourage. Tout a commencé à l’âge de 6 ans, lorsqu’il découvre le tressage. « J’ai trouvé ça intéressant, du coup, j’ai voulu me lancer », confie l’artiste qui a eu un véritable coup de cœur pour la fibre de coco, une matière pour laquelle il a toujours éprouvé de l’attirance. Aujourd’hui, il l’allie à d’autres matières, comme la nacre ou la perle. Après avoir travaillé durant près de 25 ans sur le tressage et la fibre de coco, Philippe s’est lancé dans la gravure il y a six ans. Un moyen de parfaire sa production, de faire ressortir la beauté des matières comme la nacre ou l’os, mais aussi d’apporter une touche nouvelle à l’artisanat polynésien. « J’en ai fait ma spécialité. Je me suis rendu compte que les gens adoraient les mélanges et aimaient ce qui était nouveau et original ».
Toujours innover
A force de travail et de pratique, l’artisan s’est forgé une réputation. Ses bijoux en fibre de coco accompagnés d’une nacre colorée, et parfois d’une perle pour sublimer la création, plaisent beaucoup. Colliers, boucle d’oreilles, bagues… Ses œuvres sont à découvrir lors des nombreuses expositions artisanales organisées tout au long de l’année. A chaque salon, Philippe Petis propose de nouvelles choses. Innover, développer, améliorer… L’artiste est exigeant dans son travail, et cela se ressent dans ses créations. Pour sa prochaine exposition, fin avril*, il a d’ailleurs déjà en tête un produit. Une confection améliorée par rapport à celle qui lui avait permis de remporter en 2007 le concours du plus beau bijou en nacre du concours de la bijouterie d’art. Il s’agit d’un collier habillé par une petite feuille de nacre de 1.5 centimètres, le tout associé à une branche et une perle autour du bijou. Le résultat final est magnifique, le bijou prend alors la forme d’un feuillage avec une racine. « Mais j’aimerai parfaire le modèle avec d’autres couleurs de nacre, pour le présenter au salon ».
La simplicité, gage de qualité
Quel est le processus de fabrication de cet artisan ? Comme chaque artisan, Philippe Petis a bien-sûr ses petits secrets. S’il ne dit pas tout, il révèle néanmoins quelques astuces. Pour la fibre de coco, il se fait envoyer les produits directement de Rangiroa, aux Tuamotu, d’où il est originaire. « Ma famille m’envoie tout, ensuite, je prépare à Tahiti ». Une fois la matière préparée, vient le tressage, la partie préférée de Philippe Petis. L’artisan affectionne particulièrement les tressages simples à trois, quatre. Cela lui permet de les assembler, et de rendre sa création plus fine. « C’est aussi comme cela qu’on voit le travail minutieux qui a été fait par l’artisan ».
Un travail minutieux
Quant à la nacre, le processus est quelque peu différent. Une personne à Tahiti lui prépare les nacres, et s’occupe notamment du décapage. Lorsque la nacre arrive chez Philippe Petis, elle est ainsi prête à être travaillée. Ce que l’artiste apprécie dans cette matière, ce sont les nuances de couleurs. Et pour les faire ressortir, il travaille l’intérieur de la nacre, c’est-à-dire la partie blanche. « Je gratte jusqu’à obtenir la couleur rosée, faisant ressortir le relief des motifs ». Aujourd’hui, son niveau lui permet de réaliser des formes très élaborées. Il s’amuse notamment sur le thème de la croix marquisienne, qu’il décline à tous les niveaux.
S’ouvrir pour trouver l’inspiration
Comment Philippe Petis trouve t-il son inspiration ? L’homme originaire des Tuamotu vit aujourd’hui à Tahiti, il en profite pour regarder et observer la multitude de produits qui existent sur le marché. Avec, toujours en toile de fond, sa culture pa’umotu. Il a gardé savoir-faire et patience – un art de vivre dans les atolls –, qu’il associe à sa créativité débordante.
* Exposition de l’association « Faa’a te rima ve’a ve’a ».