N°106 – Des timbres à l’effigie de Madeleine Moua et Gilles Hollande
Maison de la Culture – Te Fare Tauhiti Nui
Rencontre avec Moana Brotherson, responsable du service conception et communication philatélie à l’OPT.
Texte : DB.
Madeleine Moua et Gilles Hollande sont à l’honneur ce mois de juillet. D’abord parce que le Heiva leur rend hommage chaque année depuis plus de 20 ans : leur nom est associé aux prix du concours. Et pour cette nouvelle édition plus particulièrement : ils seront le l rouge de la soirée de remise des prix. Ensuite parce que l’OPT leur consacre deux timbres. Découverte de ces personnages qui incarnent l’épanouissement du ‘ori tahiti.
« Personne n’a oublié les noms de Madeleine Moua et de Gilles Hollande, explique Moana Brotherson, responsable du service conception et communication philatélie à l’OPT. En effet, au Heiva ils sont associés à des prix. Mais qui sait encore qui ils étaient vraiment et ce qu’ils ont fait pour le Heiva et la danse ? » C’est notamment pour répondre à cette question que deux timbres, l’un à l’effigie de Madeleine Moua et l’autre à l’effigie de Gilles Hollande, sortiront le 11 juillet prochain. « Il y aura aussi des planches et des enveloppes premiers jours* », ras- sure le responsable à l’attention des collectionneurs.
« Nous émettons au moins un nouveau timbre par mois. Chaque année, en juillet, il est en rapport avec le Heiva. Nous avons déjà abordé l’événement sous différents angles : les instruments de musique, les costumes, les danses… Nous voulions quelque chose de plus humain, plus historique. Madeleine Moua et Gilles Hollande se sont alors imposés. »
En août 2015, le service philatélie a donc fait sa proposition au comité philatélique composé d’experts de la société civile et de membres de l’OPT. L’idée a été retenue. L’étape suivante a consisté, pour Moana Brotherson, à effectuer des recherches sur les deux personnages : « La reine du Heiva » et « Le petit prince de la danse ». Cela a duré six mois. « Je suis allé voir les gens qui les avaient connus, j’ai consulté les archives, les articles de presse… J’ai cherché des photos qui correspondent au mieux aux personnages. »
La reine du Heiva
Madeleine Moua est celle qui a « redonné ses lettres de noblesses à la danse polynésienne ». Avant elle, les jeunes filles de bonnes familles ne pouvaient plus s’exprimer à travers cet art soupçonné d’être une activité à la morale douteuse. Avec sa troupe Heiva, elle a révolutionné l’image du Tiurai. En 1956, « elle a fixé les pas et séquences du ‘ori tahiti ». Avec la création de l’aéroport de Faa’a, le développement du tourisme, la mondialisation, le ‘ori tahiti a passé les frontières. Madeleine Moua et sa troupe ont été de ceux qui se sont pro- duits à l’étranger. « C’est un peu la mère de la danse polynésienne, tous les grands d’aujourd’hui sont passés dans sa troupe comme Coco, mais aussi Gilles Hollande. Un génie, brillant touche-à-tout, parti trop tôt. »
Le petit prince de la danse
Issu de la bourgeoisie urbaine, le père de Gilles Hollande était métropolitain et sa mère demie. Il a réussi haut-la-main son collège et lycée, et à obtenu un baccalauréat très jeune avant de partir en France pour y suivre des études de médecine. « Mais cela ne lui a pas plu. Il est revenu seulement quelques mois plus tard, contre l’avis de ses parents. Il avait 19 ou 20 ans. » Il a appris la danse et a monté sa propre troupe alors qu’il venait d’avoir 23 ans. Bon danseur, mais aussi bon communiquant, ce jeune homme qui parlait couramment le français, l’anglais et l’espagnol a eu rapidement de grandes ambitions. « Il voulait se montrer à l’international. Il a contacté un producteur français en lui disant : ’’je ne peux pas venir vous présenter ma troupe mais je vous fais venir pour venir la voir’’». De passage en Polynésie, le producteur est tombé sous le charme et Gilles Hollande a pu emmener ses artistes à Milan, Berlin, Budapest… « Finalement, sa carrière a été aussi courte que fulgurante. Il est parti très jeune, à 40 ans. C’était en septembre 1989, une maladie l’a emporté. »
Une fois l’historique complété, Moana Brotherson et son équipe ont sélectionné des photos pour chacun. Une pour le timbre et quatre autres pour les planches et les enveloppes premiers jours. « Nous avons trouvé notre bonheur dans l’album photo Mareva Wong-Sing. Elle avait gardé une coupure de Tahitirama dont l’illustration nous a plu. Pour Madeleine Moua, ce sont des images de Jean-Claude Soullier, un ancien de La Dépêche de Tahiti. »
Au total, 200 000 timbres de 80 Fcfp à l’effigie de Gilles Hollande et 100 000 timbres de 100 Fcfp à l’effigie de Madeleine Moua ont été commandés. Ils sont tous les deux en sépia et ont cherché à faire ressortir le côté altier, grande dame et en même temps sortant de l’ordinaire de Madeleine Moua. « Elle portait toujours des coiffes incroyables », indique Moana Brotherson. Pour Gilles Hollande, c’est le côté flamboyant du personnage qui frappe l’œil. « Nous avons retenu des photos de lui sur scène, dans la lumière, et une où il est aussi sur scène mais plus intimiste. Car il n’était pas seulement un homme de show. »
Une soirée de remises de prix pas comme les autres
Le 20 juillet aura lieu la soirée de remise des prix du Heiva. Cette année, une fois n’est pas coutume, « elle ressemblera un peu à une soirée des Oscars, avec des animations et des intermèdes qui nous rappelleront Madeleine Moua et Gilles Hollande ». Des grandes reproductions des timbres, planches et enveloppes premiers jours seront présentées. Guy Laurens, petit-fils de Madeleine Moua, sera sur scène de même qu’EstherTefana, amie de Gilles Hollande qui a composé une chanson lorsque celui-ci est parti. D’autres prestationsrythmeront la soirée grâce aux efforts conjoints de la Maison de la Culture, de l’OPT et de Polynésie 1ère.
*Enveloppe de petit format, timbrée, avec un cachetspécialement conçu pour l’occasion et une photo du même sujet que celui choisi pour le timbre. Elle est destinée aux collectionneurs.