N°104 – Le dessin archéologique au service de l’histoire et de la culture
Service de la Culture et du Patrimoine – Pu no te Ta’ere e no te Faufa’a Tumu
Textes et photos : VT d’après la synthèse des travaux de Belona Mou et Tamara Maric, archéologues au Service de la Culture et du Patrimoine.
Ils sont la représentation d’objets trouvés lors de fouilles archéologiques, souvent de l’outillage comme des hameçons, du pilon, ou encore des herminettes. Ces derniers ont été découverts lors de fouilles menées à Mangareva, à Rurutu, à Tahiti, à Moorea ou encore aux Marquises. Le dessin archéologique n’est pas seulement une reproduction d’un objet : il permet de mettre en valeur certains détails, pour une meilleure analyse du sujet abordé.
Le dessin archéologique est une étape importante lors de relevés de fouilles, car il apporte une autre dimension que le rapport de fouilles. « Il ne s’agit pas d’une reproduction simple d’un objet, mais d’une explication sur les différentes caractéristiques de l’objet. Les informations sont données sous forme de conventions précises, qui permettent au lecteur – averti – de mieux comprendre cette explication », précisent Tamara Maric et Belona Mou, archéologues au Service de la Culture et du Patrimoine.
Description d’un dessin
Par exemple, dans le dessin d’un outil en pierre taillée, « les conventions doivent faire apparaître les traces des différents enlèvements d’éclats. Avant de dessiner, il faut donc avoir analysé l’objet, ses étapes de fabrication. » Loin de supplanter la photographie, plus neutre, le dessin archéologique est une interprétation de l’objet. Les deux procédés se complètent. « Une photo ne rend pas compte de l’échelle réelle de l’objet, contrairement au dessin, nous confiait Rudy Tevivi*, dont c’était le métier. Celui-ci peut aller au-delà de ce qui est directement perçu, en valorisant les détails et les différentes coupes. L’illustration archéologique nécessite de bien connaître la fonction des objets pour être la plus juste possible. »
Dans le cas d’une herminette par exemple, le dessin doit faire apparaître les surfaces polies, différencier les surfaces retaillées mais non polies, les petites cassures. C’est pourquoi le dessin doit être fait par l’archéologue qui en réalise l’étude. Son brouillon pourra être éventuellement repris par un dessinateur professionnel. « La plupart des dessins sont techniques et permettent de comprendre le propos du texte expliquant l’objet. Certains, selon les talents du dessinateur, auront en plus de véritables qualités esthétiques. De nos jours, la photographie numérique et la facilité d’impression permettent de remplacer le dessin de certains objets par une photographie de bonne qualité. Cette dernière implique un matériel spécialisé : berne, éclairage oblique, arrière-plan neutre », expliquent les deux archéologues.
Les relevés en archéologie
Durant un chantier, les archéologues réalisent des dessins de relevés : horizontaux (des plans d’un site par exemple) et verticaux (des coupes, ou stratigraphies). Durant la fouille, ces relevés sont obligatoires – car la fouille archéologique détruit les niveaux archéologiques, sans retour en arrière possible. Ainsi, l’archéologue note le maximum d’informations afin de reconstituer les éléments qui vont lui permettre d’interpréter l’histoire du site. La stratigraphie est l’étude de la succession des couches, ou niveaux d’occupation ancienne enfouis dans la terre. Ici, la photographie ne peut pas remplacer le dessin de relevé, puisque ce dernier montre des éléments qui ne seront pas forcément bien visibles : différences de compacité du sol indiquant l’ancien creusement d’une fosse par exemple, différences minimes de couleurs, etc. Le dessin de pétroglyphe ou de statuaire (ti’i / tiki) est également la meilleure façon de faire ressortir des reliefs que souvent la photographie ne peut pas rendre entièrement visible.
Les fouilles du Département Archéologique ont débuté dès sa création en 1979. Les archives de dessin sont classées et répertoriées depuis l’existence du Service de la Culture et du Patrimoine en 2001. Un réel trésor pour la culture et le patrimoine polynésiens.
*Voir Hiro’a 47, août 2011, rubrique Le saviez-vous, « Dessiner le patrimoine ».