N°97 – Pina’ina’i : la transmission libre

Maison de la Culture – Te Fare Manah2014-pinainai-041

Centre des Métiers d’Art – TE PU HA’API’IRA’A TORO’A RIMAI


Rencontre avec Moana’ura Tehei’ura, membre de l’association Littérama’ohi et concepteur de Pina’ina’i et Viri Taimana, directeur du Centre des Métiers d’Art et lecteur de Pina’ina’i.

Texte : ASF – photos : Matareva.

 


Pina’ina’i, c’est le rassemblement des personnes habitées par les mots, par les textes. Des textes qui racontent qui nous sommes, nos joies, nos peines. Des textes qui, pour cette nouvelle édition, auront comme fil conducteur la transmission d’un patrimoine, d’une culture, d’une langue. 16 tableaux, 20 textes, 20 danseurs, 15 acteurs-lecteurs : le scénario est prometteur.

Le rendez-vous est pris. Cette année, Pina’ina’i se tiendra le 17 octobre sur le paepae a Hiro à la Maison de la Culture. Une cinquième édition qui nous parlera de transmission et sera aussi un hommage à Flora Aurima Devatine pour sa contribution au renouveau culturel à travers ses textes. Cet événement, véritable parenthèse dans le paysage culturel polynésien, aime ouvrir des pistes. Danse, musique, parole, ces repères pourraient nous renvoyer à de grands événements culturels bien connus. Mais Pina’ina’i suit sa propre voie. Ici pas de concours, pas de jury, pas de contraintes. Est-ce pour autant du théâtre ? D’une certaine manière oui, mais pas seulement. Pina’ina’i, c’est un espace d’expression unique où les textes des auteurs autochtones, ou de leurs invités sont portés par la musique et la danse. Un concept qui dépasse le cadre du spectacle et devient un temps suspendu aux mots, un temps dédié aux sens : on vient regarder, écouter une mise en commun de talents. Des danseuses et des danseurs, sélectionnés parmi les meilleurs, la contribution en amont de musiciens talentueux pour la bande sonore, des écrivains qui osent, mais aussi des personnes qui ont des voix pour les dire. En cinq ans, l’événement a pris de l’ampleur. « En 2011, personne n’y croyait. Le principe de mise en scène de lectures semblait abstrait. Mais les gens sont tout de même venus. On leur avait dit qu’il y aurait de la danse, donc il y a toujours un public pour cela, c’est une des entrées dans la culture. Et puis finalement d’année en année, le public revient pour les textes, pour les mots. On est venu au départ pour un spectacle, on revient pour la beauté des textes, on retient les citations, on retient les auteurs. Le public est touché », souligne Moana’ura Tehei’ura, le concepteur de Pina’ina’i et membre de l’association Littérama’ohi.

Défendre l’écriture

Avec Pina’ina’i, on défend d’abord l’écriture, car faut-il le rappeler, c’est bien l’association de littérature autochtone, présidée par Chantal Spitz, qui en est l’organisatrice en co-production avec la Maison de la Culture. D’ailleurs, l’ensemble des textes présentés lors de la soirée est ensuite publié dans la revue biannuelle Littérama’ohi, mais aussi sur la page Facebook de l’association. Ils peuvent également être redécouverts lors de lectures publiques. Pour Viri Taimana, directeur du Centre des Métiers d’Art et « lecteur-acteur » depuis la 4ème édition, Pina’ina’i ne montre finalement qu’une réalité, celle de Polynésiens qui couchent sur le papier, depuis plus d’un siècle, leurs histoires, leur généalogie, leurs états d’âme : « On focalise à tort sur la non-écriture dans la culture polynésienne, mais l’écriture est bien là. Ça fait plus d’un siècle qu’on a complété nos traditions orales par l’écrit».

Espace d’expression libre

Défendre l’écriture, mais d’une manière libre, c’est aussi le pari relevé par Pina’ina’i. Cette année encore, c’est Jeff Tanerii qui sera aux commandes musicales. Ce musicien talentueux tient son savoir de son père, mais a su prendre ce patrimoine en main et l’approfondir en allant faire des études de son en Australie. Depuis, son approche est d’allier sonorités et mélodies traditionnelles de percussions à des musiques plus contemporaines. En 2013, on découvrait un tango sur un ‘ori tahiti au son des percussions, un moment magique. L’année dernière, « Conquest To Paradise » de Vangelis, du film « 1492 » résonnait sur le paepae. « Ce sont ces mélanges qui font qu’on se reconnaît dans l’évolution de notre culture », explique Moana’ura qui confirme que cette année encore, il y aura des compositions originales et des reprises de morceaux. « Dans Pina’ina’i, on peut tout faire, les codes s’effacent. C’est un espace d’expression plus libre où les cultures s’entremêlent, s’entrechoquent. Le résultat est suffisamment intéressant pour qu’il puisse perdurer », précise de son côté Viri Taimana. Le spectateur aime ce qu’on raconte à Pina’ina’i, car « c’est un peu ce que nous sommes aujourd’hui. Nos inquiétudes, nos tourments, nos joies, nos peines, nos espoirs, des émotions qui se succèdent, et cela mérite un moment pour se reconnaître ou se reconnecter ».

 

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5ème Pina’ina’i : Pratique

Sur le paepae a Hiro de la Maison de la Culture

Samedi 17 octobre, à 19h00

Entrée libre

+ d’infos : 40 544 544 – www.maisondelaculture.pf

 

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