« Le voyage m’inspire une attitude poétique face au monde »- Décembre 2012
10 questions à
David Fauquemberg, écrivain
« Le voyage m’inspire une attitude poétique face au monde »
Invité par l’Association des Editeurs de Tahiti et des Îles pour le 12ème salon Lire en Polynésie, David Fauquemberg, écrivain, traducteur et auteur de guides de voyage, critique de théâtre, a un besoin viscéral de se frotter au monde. Cuba, Patagonie, Laponie, Andalousie, Californie, Europe de l’est… Il séjourne également deux ans en Australie ; une fuite dans l’ouest de l’île-continent qui lui inspire son premier roman, Nullarbor, prix Nicolas-Bouvier en 2007. Son second roman, Mal Tiempo, récit qui nous fait pénétrer dans le monde de boxeurs cubains, a notamment remporté le prix Millepages en 2009.
Pouvez-vous nous présenter votre actualité ?
Mon dernier roman est sorti en septembre 2009, et je travaille depuis à l’écriture d’un autre. Pas vraiment d’actualité, donc. D’ailleurs, le travail d’écrivain et la notion même d’actualité s’accommodent mal, je crois. L’écriture a son rythme propre, très lent en ce qui me concerne, et n’obéit qu’à des exigences internes. Se libérer de l’actualité est une nécessité de ce métier-là.
Comment avez-vous ressenti le fait d’être invité au salon Lire en Polynésie ?
Avec un immense plaisir. C’est un réel honneur d’être invité à ce salon. Et le fait d’avoir rencontré à Saint-Malo, cette année, Christian Robert, toute l’équipe et les remarquables auteurs des éditions Au vent des Îles n’a fait que décupler mon impatience d’y être !
Connaissez-vous la Polynésie ?
Je ne connais la Polynésie qu’à travers la littérature – Melville, Stevenson, Slocum… Je n’ai encore jamais voyagé dans la région, mais j’en rêvais depuis longtemps.
Quel regard portez-vous sur la littérature océanienne ?
Je dois avouer que je la connais mal, à l’exception de la littérature australienne – j’ai vécu deux ans sur l’île-continent, qui m’a inspiré mon premier roman, Nullarbor.
Au hasard, y a t-il une œuvre qui vous a particulièrement marqué ?
Je suis fasciné par l’œuvre de Patrick White, écrivain australien qui a reçu le prix Nobel en 1973. C’est un écrivain magnifique – il faut lire ses romans, notamment Voss ou The Tree of Man, deux véritables merveilles. J’ai également découvert, grâce au Vent des îles, le travail superbe de la néo-zélandaise Patricia Grace.
Etes-vous un écrivain qui voyage ou un voyageur qui écrit ?
Les deux, mais séparément : quand je voyage, je n’écris pas – le voyage m’occupe tout entier, et je prends peu ou pas de notes. Et quand j’écris, je reste immobile des mois durant : il n’y a pas plus sédentaire que le métier d’écrivain ! C’est une des raisons pour lesquelles la notion même d’ « écrivain-voyageur » me pose problème. Le voyage m’inspire, certes, car il me permet d’adopter naturellement ce « pas de côté », une attitude qu’on pourrait dire poétique face au monde. Mais quand j’écris, je suis écrivain et rien d’autre.
Comment concevez-vous votre rôle d’auteur ?
C’est une question difficile, que je me pose en permanence. Il n’est pas aisé de trouver sa place, en tant qu’écrivain. La littérature doit-elle être utile ? Je ne crois pas, du moins pas au sens, principalement matériel, « utilitariste », où on l’entend aujourd’hui. Peut-elle changer quoi que ce soit à la vie des hommes ? Elle m’a changé, moi, la lecture de Conrad, de Faulkner et tant d’autres a bouleversé ma vie. Mais je crois que si l’écrivain a un rôle aujourd’hui, c’est modestement de redonner force aux mots, de lutter contre l’anesthésie généralisée dont souffre le langage, celui des médias en particulier. J’ai parfois, physiquement, l’impression que les mots ne veulent plus rien dire. Alors, dans mon travail, j’essaie de lutter contre cela. De redonner une certaine densité au langage, pour lui faire dire le monde au lieu de le dissimuler derrière des slogans, des lieux communs, etc.
Quels sont vos projets en ce moment ?
Je suis en train de terminer un roman, qui devrait paraître en 2013.
Votre plus beau voyage ?
Le prochain, c’est-à-dire Tahiti et la Polynésie. Mes proches s’amusent souvent, lorsque je rentre de voyage, de m’entendre dire à chaque fois que c’était le plus beau…
Un message à nos lecteurs en attendant le salon ?
Je suis impatient d’arriver à Tahiti ! Je suis très heureux de pouvoir découvrir une nouvelle culture, qui me fascine depuis toujours, et cette expérience s’annonce passionnante !