Ils veillent sur le patrimoine

Vous en avez forcément déjà croisé un. Les polis lui ont murmuré un bonjour, les timides l’ont à peine regardé, les curieux l’ont interrogé sur une oeuvre. Vous avez deviné ? Les gardiens de musée bien entendu ! Qui se cache-t-il derrière eux ? Nous sommes allés le découvrir auprès de ceux qui veillent jour et nuit sur le Musée de Tahiti et des Îles…

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Depuis plusieurs années, leur quotidien est rythmé par les pas qui résonnent dans les salles du musée. Entre sécurité, accueil et surveillance des salles, la vigilance  est de mise, même si en général les visiteurs sont « bien élevés » ! Et quand les visiteurs sont sages, ne s’ennuient-t-ils pas un peu, nos gardiens ? Pas le moins du monde. « On est polyvalent, avoue Christophe Pea, le benjamin de l’équipe : sécurité, surveillance, technique, maintenance, il y a toujours quelque chose à faire ! Nous participons aussi à toutes les actions culturelles du Musée : accueil du public, chant, décoration… » Et le reste du temps, les gardiens en profitent pour s’imprégner des œuvres qui parsèment les lieux. « Pendant que l’on travaille, on regarde toujours les différents objets. Et même après plusieurs années, on découvre des détails que l’on n’a jamais vus. » Une approche intime de l’art polynésien qui leur permet de connaître de mieux en mieux ce domaine. « J’ai commencé à m’intéresser à ma culture en travaillant au Musée, poursuit Christophe Je ne suis pas un spécialiste, mais c’est vrai que j’ai appris beaucoup de choses sur notre pays, notre histoire. On développe une sensibilité particulière ici. » D’autant que la dizaine de gardiens du musée, tout comme les autres employés, ont un petit privilège : la visite guidée des nouvelles expositions avant tout le monde. Ce qui leur permet, autant que possible, de renseigner les visiteurs intrigués. Et surtout, confie Christophe, « j’encourage mon entourage à venir au Musée, je les sensibilise à notre patrimoine et à sa protection ».

De gardien de musée à artiste contemporain

De jour comme de nuit, les rondes de Mataitai Tetuanui le mènent inlassablement des réserves aux salles du Musée qu’il connaît par coeur. Avec discrétion, il œuvre lui aussi quotidiennement pour préserver son patrimoine, la mémoire ma’ohi. Mais cela ne lui suffit pas. Il continue cette mission en dehors des heures de travail, jusque dans ses créations plus personnelles, ses « délires » comme il aime à les appeler. Pas si délirantes que ça, plutôt rigoureusement organisées et maîtrisées, savamment composées. Mataitai est passionné par le patrimoine polynésien. Il est intarissable quand il raconte les légendes de son peuple, et les productions artistiques de ses ancêtres le fascinent.  Peintre, dessinateur, sculpteur, Mataitai est aussi un copiste réputé. Il faut être patient quand on lui passe une commande : parfois un an d’attente ! Mais ses reproductions valent le détour. Il maîtrise parfaitement les chefs d’oeuvres de sa culture : tiki, ti’i, umete… Même si il avoue que désormais, la création le motive davantage. « Je pars toujours des formes traditionnelles, mais j’estime que le rôle de l’artiste, aujourd’hui, est de les enrichir, les moderniser, de délivrer des messages en adéquation avec notre temps. Si nos tupuna étaient toujours là, je suis certain que ce serait les premiers à nous dire qu’il est nécessaire de faire évoluer notre art ! » Mataitai souhaite s’inscrire dans une lignée de créateurs ma’ohi apportant, à sa manière, une pierre à l’édifice de la culture polynésienne.

Marama Reorau, le doyen du Musée

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La force tranquille, c’est lui. Marama le doyen, Marama le sage, depuis 19 ans, ne se lasse pas du silence de la nuit ni du calme des réserves. Concentration, patience, endurance, ce grand sportif applique les mêmes qualités dans son travail. Ce qui lui a valu d’être longtemps le délégué du personnel. Son métier de gardien, il le perçoit presque comme un devoir, envers sa culture et les générations futures. « Le Musée conserve l’héritage de nos tupuna. Ce sont nos trésors, notre richesse. Nous devons veiller sur eux pour les transmettre à nos enfants. » Marama ne se contente pas d’avoir des principes, il les met aussi en pratique. Il a déposé au Musée une herminette et un ‘umete qu’il tenait de sa mère, qui les tenait elle-même de son père. Deux objets plus que centenaires, originaires de Taha’a. D’autres les auraient probablement vendus, mais Marama lui, a toujours cette vision du long terme. « Je veux que mes arrières arrières arrières petits-enfants puissent voir ces objets en bon état. Chez moi, ils se seraient abîmés. Au Musée, au moins, ils sont dans de bonnes conditions. » Marama n’œuvre pas seulement pour sa culture, mais pour les hommes, aussi. Ce féru de lancer de javelots, plusieurs fois champion, est le président de l’association Te Ena Vaharau, l’ancien nom du Musée de Tahiti, qui regroupe des disciplines de sports traditionnels. Tous les gardiens et personnel d’entretien du Musée en font partie ! « On organise régulièrement des journées corporatives, qui nous permettent de récolter des fonds et de les redistribuer aux membres de l’association dans le besoin. » C’est vrai que gardien, ça rime avec aider son prochain…

Musée de Tahiti et des Iles – Te Fare Manaha

–          Du mardi au samedi, de 9h30 à 17h30

–          Entrée : 600 Fcfp / gratuit pour les moins de 18 ans et les scolaires

–          Renseignements au 54 84 35 – www.museetahiti.pf

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